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À l'image des pétuniaspétunias Petunia integrifolia, de nombreuses fleurs ont besoin des pollinisateurs pour se reproduire. Elles ont donc acquis au cours de l'évolution des propriétés leur permettant d'attirer ces insectes grâce à différents signaux sensoriels (des formes, des couleurscouleurs ou des odeurs, par exemple), puis de les récompenser en leur fournissant de la nourriture, c'est-à-dire du pollen et du nectar.
Les pollinisateurs ont de leur côté une obsession récurrente durant leurs explorations : rentabiliser au maximum leurs dépenses énergétiques. Ils sont donc sensibles aux indices leur permettant de trouver rapidement des fleurs répondant à leurs attentes.
Les bourdons terrestres Bombus terrestris volent en battant très rapidement des ailes, ce qui pourrait occasionner l'apparition de charges positives sur leur corps comme chez les abeilles Apis mellifera. Ces charges sont utiles aux insectes, puisqu'elles leur permettent notamment de coller le pollen sur leurs poils lorsqu'ils se posent sur des fleurs. Cette interaction a une autre conséquence : des charges sont transférées à la plante lors du contact et modifient ainsi son champ électriquechamp électrique.
Une étude parue dans la revue Science vient de présenter une étonnante découverte à ce sujet : les bourdons perçoivent ces changements électrostatiquesélectrostatiques ! Cet animal devient donc le premier insecte connu doté de capacités d'électroréception. L'étude a été dirigée par Daniel Robert de l'université de Bristol (Royaume-Uni).
L’électroréception, une aide à la décision chez le bourdon
Les expériences se sont déroulées en quatre temps. Il a d'abord fallu vérifier que les bourdons acquièrent bien des charges électriques en volant. Grâce à un leurre composé de sucrosesucrose, plus de 50 individus ont donc été attirés dans une cage de Faradaycage de Faraday pourvue en son centre d'un dispositif mesurant les charges présentes. Sans grande surprise, 94 % des insectes ont répondu aux attentes. Dans un deuxième temps, tous les bourdons ont été placés individuellement dans une arènearène contenant un pétunia violet dont le champ électrique était mesuré. Ses propriétés ont changé durant une centaine de secondes à la suite de chaque contact avec un insecte.
Les bourdons ont ensuite été libérés dans une arène en présence de fleurs artificielles. La moitié d'entre elles contenaient du sucrose et étaient chargées positivement. Les autres renfermaient de la quininequinine, une substance amère, et étaient reliées à la terre, donc sans charge. Les pollinisateurs ont alors visité les fleurs contenant la récompense sucrée de plus en plus souvent. Ces dernières ont finalement été neutralisées en l'absence des insectes qui, à leur retour, ont visité les deux types de fleurs en proportion égale et constante.
Les bourdons exploiteraient donc l'électroréception pour percevoir le champ électrique des fleurs, déterminer si elles ont été visitées récemment par des congénères et surtout si elles valent le détour. Cette approche évite les explorations inutiles et donc des dépenses énergétiques superflues. Cette capacité s'ajouterait à celles qui permettent aux pollinisateurs de choisir leur cible en fonction de signaux visuels ou olfactifs. Elle ne les remplace donc en rien. Après tout, une fleur doit bien être butinée une première fois pour que son champ électrique soit modifié.