Une nouvelle étonnante vient enrichir les exploits des espèces migratrices. La sterne arctique migrerait sur une distance de plus de 70.000 kilomètres par an, soit le double de ce qui lui était attribué. C’est grâce à un géolocalisateur minuscule que ce record a pu être homologué.

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    La sterne arctique (Sterna paradisaea) est un oiseau marin délicat qui réalise chaque année une très longue migration entre l’Arctique et l’Antarctique. © Carsten Egevang

    La sterne arctique (Sterna paradisaea) est un oiseau marin délicat qui réalise chaque année une très longue migration entre l’Arctique et l’Antarctique. © Carsten Egevang

    Elle ne pèse qu'une centaine de grammes et pourtant elle mérite d'être inscrite dans le Guiness des records à la rubrique Migration la plus longue. Or, jusque-là, personne ne s'en était rendu compte. Mais son exploit est désormais incontestable. Une équipe de recherche internationale (Groenland, Danemark, Etats-Unis, Angleterre et Islande) vient en effet de cartographier l'itinéraire de migration de cet oiseau de mer délicat, la sterne arctique (Sterna paradisaeaSterna paradisaea).

    Les données recueillies grâce à un appareil de géo-tracking miniature ont permis non seulement de confirmer l'aire d'hivernage de cette sterne, mais aussi de déterminer la distance qu'elle parcourt et les itinéraires qu'elle emprunte.

    Il était connu qu'elle reliait annuellement le Groenland à l'Antarctique, mais le suivi précis de son parcours a révélé plusieurs surprises aux chercheurs.

    Tout d'abord, la sterne affiche au compteur 71.000 kilomètres par an, soit, au cours des 30 ans de sa vie, plus 2,4 millions de kilomètres. De quoi s'offrir trois aller et retour vers la LuneLune ! C'est deux fois plus que ce que laissait présager les précédentes études. La sterne arctique bat donc de 4.000 kilomètres le précédent détenteur du record de migration, le Puffin fuligineux (Puffinus griseus).

    Ensuite, les sternes volent en zigzag et, à la grande surprise de Carsten Egevang, principal auteur de l'étude, s'arrêtent souvent un mois dans les eaux poissonneuses de l'Atlantique nord, sûrement pour faire le plein avant de traverser les autres régions, plus pauvres.

    Cliquer pour agrandir. Carte des migrations des sternes arctiques. En vert, le voyage d’automne avec sa bifurcation au niveau de l’Equateur entre l’Amérique du sud et l’Afrique. En rouge, les déplacements pendant l’hiver et en jaune, le voyage du printemps avec sa forme de « S » caractéristique. © Carsten Egevang

    Cliquer pour agrandir. Carte des migrations des sternes arctiques. En vert, le voyage d’automne avec sa bifurcation au niveau de l’Equateur entre l’Amérique du sud et l’Afrique. En rouge, les déplacements pendant l’hiver et en jaune, le voyage du printemps avec sa forme de « S » caractéristique. © Carsten Egevang

    Deuxième surprise, au niveau des îles du Cap Vert, la moitié des sternes continue à longer les côtes africaines tandis que l'autre moitié longe celles d'Amérique du sud.

    Enfin, les oiseaux passent l'hiver dans les eaux de l'Antarctique et retournent au printemps vers le Groenland. Cette fois-ci encore, leur parcours est singulier puisqu'il prend la forme d'un « S » avec des détours de plusieurs milliers de kilomètres.

    Les sternes aussi ont droit aux gadgets high-tech

    Selon AIain Stenhouse, co-auteur de l'étude, les sternes profitent des vents dominants pour économiser leur énergieénergie. Comme ces vents sont déviés par la force de Coriolisforce de Coriolis vers la gauche dans l'hémisphère sudhémisphère sud et vers la droite dans l'hémisphère nordhémisphère nord, leur trajectoire adopte cette forme de « S » centrée sur l'Equateur.

    Jusqu'à récemment, seuls les oiseaux les plus grands pouvaient transporter des balises de géo-tracking. Le nouveau transmetteur miniature de 1,4 gramme peut être accroché à des oiseaux aussi petits qu'une sterne, qui pèse une centaine de grammes.

    Le géolocalisateur utilisé est si petit (1,4 g) qu’il peut être attaché à un anneau de métal sur la patte des sternes. Pour récupérer les données, il faut re-capturer l’oiseau. © Carsten Egevang

    Le géolocalisateur utilisé est si petit (1,4 g) qu’il peut être attaché à un anneau de métal sur la patte des sternes. Pour récupérer les données, il faut re-capturer l’oiseau. © Carsten Egevang

    Pour Richard Phillips du British Antarctic Survey, l'un des co-auteurs de l'étude, « l'utilisation de ces appareils sur des oiseaux de mer n'a pas seulement révolutionné [la] compréhension des schémas de migration, mais les données obtenues sur la distribution facilitent aussi l'identification d'importants hotspotshotspots biologiques ».

    Reste la question de savoir pourquoi faire une migration aussi longue. Carsten Egevang y répond avec pragmatisme : « A vue de neznez, ça doit être à cause de la richesse des zones de nutritions qu'elles voyagent si loin ».