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Aurait-on percé un peu plus profondément le mystère entourant le yéti ? Bryan Sykes, généticiengénéticien reconnu de l'université d’Oxford s'est lancé dans le projet d'analyser scientifiquement les éléments censés provenir de cette étrange créature. Son analyse, encore partielle, semble indiquer que l'animal serait plus proche de l'ours que du primate...
Le contexte : le mythe du yéti à l’épreuve de la science
Qui est donc le yéti ? Dans la tradition tibétaine, ce nom, associé à une créature bipède effrayante, revient depuis longtemps. Dans la culture européenne, cette notion est apparue plus tardivement, au cours du XXe siècle, lorsque les explorateurs ont commencé à affronter les sommets enneigés de l'Himalaya. Des témoignages d'autochtones ou des empreintes de pas anormalement grandes ont entretenu la légende d'un être bipède et humanoïdehumanoïde vivant caché dans la montagne, et rarement observé.
De nombreux aventuriers se sont lancés à sa poursuite et ont raconté une multitude d'histoires, qui tiennent davantage du mythe que de la réalité. Effectivement, les scientifiques doutent de l'existence du yéti. Comment expliquer que l'on ne dispose d'aucun reste et d'aucune observation précise et complète, selon des protocolesprotocoles rigoureux, d'une créature pourtant si recherchée ?
Face aux diverses légendes racontées, le généticien Bryan Sykes, connu pour avoir déjà travaillé sur de l'ADNADN ancien, a eu l'idée de se servir des techniques modernes en biologie pour analyser les éléments supposés provenir du yéti. Une telle méthode avait été utilisée en 2008 et montrait que les poils récupérés venaient en fait d'une chèvre de la région. Cette fois, le Britannique disposait de deux échantillons : l'un, récupéré il y a une quarantaine d'années par un Français dans la région de Ladakh en Inde, et l'autre, plus récent, dans une forêt de bambous au Bhoutan. Qu'allait-il découvrir ?
Les deux échantillons de poils, trouvés à 1.285 km d'écart, auraient semble-t-il appartenu à des yétis. L'un d'eux a été récupéré par un chasseur autochtone qui aurait tué une bête ressemblant à un ours, et qui a confié ces poils à un Français, de passage dans la région dans les années 1970. © Philippe Semeria, Wikimedia Commons, cc by 3.0
L’étude : de l’ADN d’ours polaire dans les poils du yéti
Grâce à une méthode qu'il a lui-même développée, il est capable d'extraire de l'ADN de bonne qualité à partir d'un seul poil de l'animal supposé. Il s'est focalisé sur l'ADN mitochondrial, et plus précisément sur sa région nommée ARNARN 12S, très souvent utilisée dans la comparaison des mammifères. Puis il a comparé les séquences avec celles collectées dans des banques de gènesgènes. Une seule espèce dispose d'une région du génomegénome identique à 100 % à ce qui a été observé : un ours polaire retrouvé dans l'archipel norvégien de Svalbard, qui vivait voilà 120.000 à 40.000 ans.
Quelle interprétation en donner ? Le scientifique est prudent et ne s'avance pas sur un terrain trop glissant. Cette étude est préliminaire et demande encore de nouvelles données pour être confirmée. Néanmoins, il émet l'hypothèse que le yéti pourrait être confondu avec un ours, plus précisément une sous-espèce inconnue d'ours brun, qui aurait un comportement inhabituel et une propension importante à la bipédie, si l'on en croit les descriptions faites. Serait-ce une sorte d'hybridehybride ? C'est l'une des pistes privilégiées.
L’œil extérieur : la prudence reste de mise
Pour l'heure, aucun article scientifique n'a été publié, mais il est précisément en train d'être étudié par une revue à comité de lecture. Si l'analyse semble sérieuse, et recourt à des techniques scientifiques indiscutables, ce qui est rarement le cas lorsqu'on parle du yéti, il ne faut donc pas se perdre trop vite en conjectures. Les échantillons en question n'ont pas été récoltés par des chercheurs, ce qui doit inciter à la vigilance. Néanmoins, le but affiché est simplement de tester ce qui est censé caractériser la créature. Si les poils proviennent effectivement de ce qui est pris pour l'abominable Homme des neiges, alors il faudrait revoir son éventuelle classification.
Pour apporter des conclusions plus pertinentes, la meilleure chose à faire serait d'observer l'animal en vrai. Mais est-ce seulement possible?
Chronique Science décalée
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Pourquoi une rubrique Science décalée ? Cette chronique hebdomadaire a pour ambition de montrer que la science peut aussi être drôle et inattendue, et surtout qu’elle brasse vraiment tous les domaines possibles et imaginables. Ainsi, on peut faire du sérieux avec du farfelu, et de l’humour avec des sujets à priori peu risibles. Chaque semaine donc, nous sélectionnons l’info la plus étrange ou surprenante pour vous la faire partager le dimanche, entre le fromage et le dessert.