Pour la première fois, des chercheurs australiens viennent de définir le coût énergétique de la reproduction chez... le calmar. Durant l'expérience, ces animaux marins ont d’abord dû démontrer leur performance de nage avant d’être autorisés à copuler, parfois durant 3 heures. Aussitôt l’acte reproducteur terminé, ils ont été incapables de nager aussi vite qu’avant, mais pendant combien de temps ?

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    Chez de nombreuses espèces animales, les accouplements ne sont pas toujours de tout repos. Les efforts physiquesphysiques consentis requièrent la mobilisation d'une quantité considérable d'énergieénergie, sans compter les risques de blessures, voire de mort si la femelle a des tendances cannibales (par exemple chez des insectes). Le coût de la reproduction est donc lourd, d'autant plus que l'énergie épuisée ne peut plus être utilisée pour fuir face à des prédateurs ou pour trouver sa nourriture, ce qui réduit ainsi les chances de survie des deux partenaires.

    Le coût de la copulation a déjà fait l'objet de nombreux travaux pour diverses espèces, notamment chez les insectes, mais un groupe semble avoir été négligé jusqu'à présent : les calmars. Cette lacune est maintenant comblée grâce à une nouvelle étude publiée dans la revue Biology Letters. Amanda Franklin, de l'University of Melbourne, vient en effet de décrire le coût énergétique d'une relation amoureuse, pour rester romantique, entre deux calmars Euprymna tasmanica (SouthernSouthern dumpling squidsquid en anglais). Le choix de ce céphalopode comme modèle est évident, les actes copulatoires de cette espèce peuvent en effet durer jusqu'à 3 heures.


    Le calmar Euprymna tasmanica, ici filmé en Tasmanie, vit entre 0,5 m et 80 m de profondeur. Cet animal nocturne reste enfoui sous le sable la journée. © Saspotato, Flickr, CC by-nc-sa 2.0

    Des calmars soumis à des épreuves de sportifs

    Cet animal marin pouvant atteindre une longueur de 7 cm à l'âge adulte vit dans le sud de l'Australie et à proximité du littoral tasmanien. Avec une duréedurée de vie inférieure à 1 an, il est particulièrement important pour les mâles de profiter de toutes les occasions offertes durant la saison des accouplements pour transmettre leurs gènesgènes. Lors d'une rencontre fortuite avec une partenaire du sexe opposé, les mâles agrippent les femelles par le dessous et les maintiennent en position, au prix de certains efforts, durant tout l'accouplement. Cet acte n'empêche pas les partenaires de changer de couleurcouleur, en passant selon leur besoin du jaune sablesable au pourpre taché de violet et d'orange, ou même de libérer de l'encre.

    Des spécimens sauvages ont été capturés de nuit par des plongeurs à St Leonards, dans le sud de l'Australie. Ils ont ensuite, après un séjour en aquarium, été placés individuellement dans un couloir de nage. Un courant soutenu leur a alors été opposé jusqu'à ce qu'ils n'aient plus la force d'exécuter des mouvements locomoteurs (le temps de nage a été enregistré). Pour les réconforter, 30 spécimens des deux sexes ont eu le droit de s'accoupler, bien souvent à l'initiative des mâles, dès le lendemain. Aussitôt l'acte effectué, les deux partenaires ont à nouveau été placés dans le couloir expérimental en vue de tester une seconde fois leur endurance.

    Une relation sexuelle fatigante pour l’un… comme pour l’autre

    Leurs performances locomotrices ont été divisées par deux après les accouplements, le temps de nage étant en moyenne passé de 120 s à 60 s. Aucun lien n'a été trouvé avec la massemasse des sujets d'étude, la durée de la copulation ou même le sexe des individus. Bien que le travail du mâle semble plus ardu, les deux partenaires ont présenté des niveaux de fatigue identiques. Les capacités de nage initiales sont revenues 30 min après la fin de l'acte amoureux.

    Cette baisse de régime serait liée à une fatigue musculaire passagère. Une période particulièrement critique, les calmars ne disposant plus de toutes leurs capacités pour fuir, trouver leur nourriture ou... un nouveau partenaire. Le coût énergétique de la reproduction dans ce cas est donc important. Heureusement, ces céphalopodescéphalopodes, dont une dizaine d'espèces proches peuplent d'autres mers du globe, auraient une parade pour éviter de servir de pitance à un prédateur : ils s'enfouiraient dans le sable aussitôt l'acte copulatoire terminé.