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L'éléphant d'Afrique, le plus grand animal terrestre actuel ne fait pas le poids face à des fourmis voraces. © Tim et Annette
Dans la savane africaine, les arbres sont rares et peuvent être la cible de feux ou d'animaux herbivores, menaçant l'équilibre, pour le moins précaire, entre forêt et savane. Sans une certaine protection, les arbres pourraient disparaître complètement. Devant les incendies, l'acacia est réellement impuissant mais face aux herbivores, l'arbre n'a pas dit son dernier mot.
En effet, la vulnérabilité des plantes, qui ne peuvent a priori ni fuir ni riposter face à des attaques ennemies, n'est que poudre aux yeuxyeux. Ainsi, elles ont mis au point des stratégies efficaces aussi inventives que variées. Parmi les stratégies utilisées, la sécrétionsécrétion de molécules répulsives ou... l'appel à un ami. C'est par exemple le cas d'une espèce de tabac qui alerte une punaise, le prédateur de la chenille venue pour dévorer la plante.
En Afrique, beaucoup d'espèces d'acacias, bien que protégées par de longues épines pointues, sont dévorées par les éléphants dont la peau épaisse rend l'animal insensible. Pourtant, une espèce particulière, Acacia drepanolobium, ne semble pas intéresser les pachydermes. Se pourrait-il que les éléphants n'aiment tout simplement pas son goût ?
D'après les écologistes Todd Palmer de l'université de Floride à Gainesville et Jacob Goheen de l'université du Wyoming à Laramie, c'est une toute autre histoire. Ces acacias sont colonisés par des fourmis du genre Crematogaster dont la morsuremorsure est un vrai supplice. Elles vivent dans des épines particulières de l'arbre qui prennent la forme d'un globe creux et se nourrissent de la sève sécrétée par les feuilles. Cette symbiose est connue depuis longtemps, mais l'effet de protection vient seulement d'être prouvé dans le journal Current biology.
Acacia drepanolobium offre des épines en forme de globe aux fourmis du genre Crematogastern, qui en font leur gîte. © Pharaoh han / Licence Creative Commons
Un fort impact sur la flore de la savane
Les écologistes ont utilisé 6 éléphants orphelins du centre de réhabilitation du Kenya pour réaliser une sorte de test de consommateur, cosnistant à leur proposer différentes sortes de nourriture : des branches d'arbres d'A. drepanolobium dont les épines globulairesglobulaires ont été ouvertes et vidées des insectesinsectes ; des branches soumises au même régime mais replongées dans les fourmis récoltées ; des branches de l'arbre voisin Acacia mellifera plongées ou non dans les fourmis. Les résultats sont clairs : les éléphants aiment les deux espèces d'acacias, mais uniquement lorsqu'elles sont dépourvues d'insectes.
L'expérience a été menée dans la nature en éliminant à plus ou moins long terme les fourmis par enfumage de quelques arbres d'A. drepanolobium. Un an plus tard, l'observation des dégâts provoqués par les pachydermes montre que les arbres les moins recolonisés par les fourmis sont les plus abîmés, alors que ceux qui possédaient un nombre important d'envahisseuses n'ont pas été touchés.
Vue du ciel grâce aux images satellites, cette symbiose qui ne semble avoir un effet qu'à petite échelle montre un fort impact sur l'équilibre de la savane. En effet, avec l'augmentation de la population des éléphants entre 2003 et 2008, les zones peuplées des espèces d'arbres privées de fourmis ont significativement diminué entre ces mêmes dates, alors que les zones peuplées d'A. drepanolobium sont restées relativement stables.