La prévision des séismes va-t-elle s’améliorer grâce à des fourmis ? C’est ce que suggère une étonnante découverte faite dans l’Eifel, en Allemagne. Les fourmis rousses des bois installées sur des failles actives cessent en effet toutes leurs activités, et sortent de leur fourmilière, plusieurs heures avant l’arrivée de secousses sismiques !

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    Les séismes causent chaque année de gros dégâts matériels et de nombreux décès. C'est pourquoi les scientifiques cherchent à mieux les prévoir, mais leurs résultats sont loin d'être satisfaisants, les signes annonciateurs n'étant détectés que quelques minutes avant l'arrivée des secousses. Certains animaux, comme le crapaud commun, parviennent pourtant à détecter l'arrivée d'un tremblement de terretremblement de terre plusieurs heures ou jours à l'avance. Une autre espèce pourrait révolutionner la prévision des séismes : la fourmi rousse des bois (Formica rufa).

    Ce petit arthropode mène une vie bien rodée dans les forêts de conifères et de feuillus européennes, mais un détail trouble Gabriele Berberich (université de Duisburg-Essen) depuis quelques années. Plus de 15.000 fourmilières ont été recensées le long de failles activesfailles actives gazifières et ce, rien qu'en Allemagne. Or, les déplacements tectoniques leur ayant donné naissance peuvent causer des séismes. Les fourmis en ont-elles conscience ? Pour le savoir, deux colonies ont été placées sous surveillance 24 h sur 24 et 7 j sur 7 pendant 3 ans.

    De 2009 à 2012, les fourmis rousses des bois filmées ont toutes quitté leur fourmilière à dix reprises. Des secousses sismiques ont à chaque fois été détectées quelques heures plus tard. Les faits ont été présentés durant la rencontre annuelleannuelle de l'European Geosciences Union (EGU) ce 11 avril. Ils ouvrent de nouvelles perspectives pour la prévision des tremblements de terre. 

    Ces fourmilières (indiquées par les flèches rouges) de fourmis rousses des bois (<em>Formica rufa</em>) sont situées à l'aplomb d'une faille active dans l'Eifel, en Allemagne. Pour la petite histoire, c'est en distillant une grande quantité d'insectes morts de cette espèce que John Ray réussit pour la première fois à extraire de l'acide formique, en 1671. © Gabriele Berberich

    Ces fourmilières (indiquées par les flèches rouges) de fourmis rousses des bois (Formica rufa) sont situées à l'aplomb d'une faille active dans l'Eifel, en Allemagne. Pour la petite histoire, c'est en distillant une grande quantité d'insectes morts de cette espèce que John Ray réussit pour la première fois à extraire de l'acide formique, en 1671. © Gabriele Berberich

    Une sensibilité liée à la magnitude du séisme

    La surveillance des deux colonies s'est faite au moyen de caméras couleurcouleur et infrarougeinfrarouge. Les sites d'étude, distants de 30 km, se situaient dans le bassin de Neuwied (Eifel), là où 100 séismes sont en moyenne détectés par an. Les 45.000 heures d'enregistrement ont été analysées en temps réel, à l'aide d'un logiciellogiciel détectant automatiquement tout changement de comportement chez les insectes. C'est donc lui qui a montré que les fourmis cessaient leurs activités de jour, ou quittaient leur fourmilière de nuit, quelques heures avant la survenue d'un séisme, mais à une condition. 

    Selon les enregistrements sismiques, seules les secousses d'une magnitudemagnitude supérieure à 2,0 ont suscité des réponses. La cessation d'activité et l'abandon de la fourmilière ne sont bien évidemment pas permanents. Les fourmis ont ainsi repris leur comportement routinier le lendemain des tremblements de terre. Mais comment ces insectesinsectes de 8 à 10 mm de long détectent-ils les séismes à l'avance ? 

    Des fourmis pour sauver des vies humaines

    Deux hypothèses sont avancées. Les fourmis pourraient, grâce à des chémorécepteurschémorécepteurs connus, percevoir des changements dans la composition des gaz libérés par la croûte terrestrecroûte terrestre (comme l'argonargon ou le CO2). Ou bien leurs magnétorécepteurs les informeraient d'une éventuelle variation du champ électromagnétiquechamp électromagnétique local. Des recherches approfondies vont tenter de percer ce mystère. Par ailleurs, les chercheurs envisagent également d'étudier le comportement de fourmis vivant sur des sites tectoniquement plus actifs.

    Comment maintenant exploiter cette découverte pour mieux prévoir les séismes ? Tout simplement en mettant des fourmilières sous surveillance en permanence ! Ainsi, des êtres humains auront peut-être bientôt la vie sauve grâce à des fourmis, puisqu'ils auront pu se mettre à l'abri quelques heures avant l'arrivée d'un tremblement de terre. Cette surveillance serait facile à mettre en place car, à l'inverse des crapauds ou d'autres animaux, les fourmilières ne se déplacent pas.