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Le mâle de l’espèce Antechinus stuartii peut s’accoupler pendant 14 h avec plusieurs femelles. Il aurait ainsi plus de chance d’assurer sa descendance. Cela a cependant un coût : une fois sa tâche effectuée, il meurt rapidement. © dnatheist, Flickr, cc by 2.0
Les mâles de plusieurs espèces de marsupiaux insectivores ont des pratiques plutôt étranges à nos yeuxyeux. Une fois leur maturité sexuelle atteinte, ils attendent patiemment la saison des amours et s'accouplent frénétiquement avec différentes femelles, jusqu'à en mourir d'épuisement !
Ce comportement particulier, appelé reproduction suicidaire ou sémelparité, n'est en réalité pas nouveau dans le monde vivant. Par exemple, une fois sa descendance assurée, le saumon ordonne à ses cellules de se suicider et se désagrège de l'intérieur en quelques heures. Certaines plantes comme le bambou sont également sémelpares et n'ont qu'un seul cycle de reproduction au cours de leur vie. La plupart des êtres vivants qui utilisent cette stratégie donnent naissance à un très grand nombre de petits. Ils peuvent donc mourir en paix sachant que leur patrimoine génétique est transmis à la nouvelle génération.
Les éphéméroptères ou éphémères, qui portent bien leur nom, sont sémelpares. Ces insectes ont un stade larvaire long et un stade adulte très court, qui leur laisse juste le temps de se reproduire. © jd.echenard, Flickr, cc by nd 2.0
Pourquoi certains marsupiaux, qui ont pourtant une descendance limitée, adoptent-ils aussi une telle stratégie sexuelle ? Cette question interpelle les scientifiques depuis de nombreuses années. À l'origine, ils pensaient que ce comportement était une forme d'altruisme et qu'en mourant, les mâles laissaient plus d'insectes disponibles pour leur progéniture.
La fureur de s’accoupler
Des recherches récentes suggèrent qu'il n'en est rien. Selon des scientifiques de l'université du Queensland en Australie, les mâles marsupiaux vivent et meurent rapidement pour une raison simple : fertiliser le plus grand nombre de femelles avec le meilleur sperme possible.
Dans cette étude, publiée dans la revue Pnas, les auteurs ont comparé les marsupiaux ayant un mode de reproduction suicidaire avec ceux qui s'accouplent de manière plus étalée au cours de leur vie. Ils ont observé que les animaux sémelpares possédaient des testicules beaucoup plus gros que les autres. Ils sont donc capables de stocker plus de sperme et peuvent ainsi se reproduire de nombreuses fois et pendant plusieurs heures, avant d'avoir épuisé leurs réserves. Ils utilisent toute leur énergieénergie pour accomplir cette tâche et finissent par mourir.
Une compétition de spermes
« La reproduction a toujours un coût, c'est une activité qui demande beaucoup d'énergie. Les mâles peuvent se reproduire pendant 14 heures d'affilée et dépensent toute leur énergie », explique la chercheuse Diana Fisher, directrice de l'équipe. Chez les marsupiaux sémelpares, la saisonsaison de reproduction est en général assez courte. « Les géniteurs doivent agir vite pour utiliser au maximum leur semence. » Une fois leur performance sexuelle réussie, ils sont à plat et meurent en général d'infections ou d'hémorragies internes. « Ils s'accouplent jusqu'à la mort », ajoute la chercheuse.
Ainsi, au lieu de se battre pour leurs bien-aimées comme le font de nombreux animaux, les souris marsupiales mâles rivalisent avec leur spermesperme. Les femelles s'accouplent plusieurs fois, et au final c'est le meilleur sperme qui l'emporte. Et pour optimiser sa qualité, les mâles sont prêts à tout, même à donner leur propre vie. « Dans ce type de sélection sexuelle, les mâles se battent à l'intérieur de la femelle plutôt qu'à l'extérieur. »