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Un pied de maïs totalement rongé par les larves de la chrysomèle. © Marlin Rice/Iowa State University
Les biologistes de l'université de l'Iowa l'ont confirmé. La chrysomèle (Diabrotica virgifera virgifera), insecte dont les larves dévorent les racines du maïsmaïs, devient résistante à la toxinetoxine Bt produite par la céréale modifiée génétiquement. Sans entrer dans le débat « pour ou contre les OGM », l'alerte fait apparaître certaines limites de cette biotechnologiebiotechnologie.
Le maïs Bt est un des premiers organismes génétiquement modifiésorganismes génétiquement modifiés (OGM) créés et commercialisés par le semencier américain Monsanto. Les biologistes du groupe ont inséré le gènegène d'une bactérie (Bacillus thuringiensisBacillus thuringiensis) dans le génomegénome de la plante. Elle peut ainsi produire une toxine censée neutraliser les insectes qui l'attaquent. Mais la chrysomèle est une dure à cuire.
- la rotation de différentes cultures sur une même parcelle, mais l'insecte a réussi à survivre sur le sojasoja en attendant le retour de son cher maïs ;
- les traitements par insecticides, coûteux, contre lesquels des phénomènes de résistancerésistance ont émergés ;
- la création récente d'OGM.
La chrysomèle, dont la larve fait tant de dégâts dans les champs de maïs. © Patrick Dockens, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
La responsabilité des agriculteurs
À leur arrivée sur le marché, ces variétés ont connu un franc succès chez les agriculteurs américains. En 2009, le maïs Bt représentait 45 % des cultures de cette céréale aux États-Unis. Pour ralentir l'apparition d'une résistance malgré un tel développement, il aurait été nécessaire de suivre les recommandations de l'Agence américaine pour la protection de l'environnement : conserver 20 % de la surface cultivée en maïs traditionnel.
La présence de cultures normales, refuges, permet de maintenir une population d'insectes sensibles à la toxine où viennent se diluer les quelques individus résistants sélectionnés dans les zones OGM. Cela évite une transmission trop rapide des gènes de résistance aux générations suivantes, où les individus adaptés restent alors une exception.
La majorité des agriculteurs ont appliqué les consignes, mais la proportion de réfractaires, qui ne laissent pas ou ou très peu de maïs traditionnel, est passée de 10 % à 25 % entre 2005 et 2008. À cela s'ajoute l'arrêt de la rotation des cultures, qui pérennise les populations d'insectes. La résistance actuelle est en effet constatée sur des parcelles où les semences OGM ont été utilisées au moins trois années de suite.
À la décharge des agriculteurs, des analyses en laboratoire ont montré que la résistance apparue chez la chrysomèle semble portée par un gène dominant : une seule copie, du père ou de la mère, (et non les deux) suffit pour qu'elle s'exprime, rendant sa propagation plus difficile à ralentir.
Course aux armements
Pour Denis Bourguet, de l’Inra, « il aurait été sage d'associer dès le départ plusieurs toxines », comme une trithérapietrithérapie peut le faire face à un virus difficile à traiter. Mais dans tous les cas, il est irréaliste de vouloir vaincre définitivement ces ravageurs. Pour Mickael Gray, spécialiste de la question à l'université de l'Illinois, « le développement de résistance est inévitable en quinze à vingt-cinq ans ». Or le maïs Bt est commercialisé depuis 1996.
Le logo de la firme Monsanto, productrice des semences de maïs Bt. © Limagrain, Wikipedia
Même pour leurs partisans, les OGM ne sont pas une solution définitive, mais une technologie qui doit régulièrement être adaptée. Alors, si Monsanto prend l'alerte au sérieux, le producteur de semences ne s'affole pas et ne remet pas en cause son modèle. Il ne préconise même pas de changer de type semence.
Pour l'instant. Car en réserve, de nouveaux produits sont prêts, assurant l'avenir du groupe si le maïs Bt devient réellement obsolète. Le SmartStax™, par exemple, qui cumule un gène luttant contre les vers des racines, un contre les lépidoptères ravageurs et un dernier assurant à la plante une résistance accrue aux herbicidesherbicides. Le tout intégrant dès le départ un pourcentage de semences traditionnelles qui constitueront les refuges recommandés.
C'est bien là le départ d'une « Course de la Reine Rouge » chère à Lewis Caroll, où les efforts de recherche des biotechnologies se confrontent à l'évolution d'insectes sélectionnés par le nouvel environnement créé. Reste à savoir comment vont réagir les organismes classiques, coincés entre les futurs « super-ravageurs » et les futures « supersemences » que promet cette guerre...