Inventer un système capable de faire preuve d’intelligence en imitant ni plus ni moins le fonctionnement du cerveau humain : l’idée pourrait bien passer du domaine de la science-fiction à celui de la science tout court ! Si cette prouesse devenait réalité, ce serait notamment grâce aux recherches menées par une équipe de l’université de Kiel (Allemagne) et à un mystérieux composant électronique baptisé « memristor ».

au sommaire


    Comment le cerveaucerveau s'y prend-il pour recueillir, traiter et stocker le flux de données auquel il est chaque jour exposé ? Et comment parvient-il à gérer les tâches complexes qui lui incombent tout en ne dépensant qu'une quantité dérisoire d'énergie ? Si les secrets de l'efficacité du cerveau humain n'ont pas encore tout à fait été levés, des chercheurs de l'université de Kiel (Allemagne) sont parvenus à reproduire artificiellement deux des schémas fondamentaux du fonctionnement de notre cerveau : la plasticité synaptique et la synchronisation des ondes cérébrales. Le tout grâce à de surprenants composants électroniques : les memristors.

    Rappelons que, dans le cerveau humain, les neuronesneurones sont interconnectés par le biais de synapsessynapses. L'ensemble forme un réseau incroyablement complexe. Tout au long de notre vie, lorsque nous apprenons, les connexions synaptiques créées un jour se réorganisent pour s'adapter à une situation nouvelle. Les scientifiques ont baptisé ce phénomène « la plasticité synaptique ».

    Mais ce qui donne de l'efficacité à notre capacité d'apprentissage et de mémorisation, c'est le fait que notre cerveau soit capable, en parallèle, de synchroniser les ondes cérébrales, celles-là mêmes qui transmettent les informations de neurone en neurone. Ce sont ces deux phénomènes, d'une importance capitale dans le fonctionnement et dans l'efficacité de notre cerveau, que les chercheurs sont parvenus à reproduire au cœur d'un circuit électronique.

    Les chercheurs de l’université de Kiel (Allemagne) ont interconnecté des oscillateurs par le biais de memristors. Ceux-ci se sont alors synchronisés comme le font les neurones dans le cerveau humain. © Christian Urban, <em>Kiel University</em>

    Les chercheurs de l’université de Kiel (Allemagne) ont interconnecté des oscillateurs par le biais de memristors. Ceux-ci se sont alors synchronisés comme le font les neurones dans le cerveau humain. © Christian Urban, Kiel University

    Une résistance qui a de la mémoire

    Pour arriver à leurs fins, ils ont utilisé un composant électronique d'un genre nouveau, un memristor. C'est dans les années 1970 que le principe du memristor - pour memory resistor, comprenez « résistancerésistance à mémoire » - a vu le jour. Mais c'est seulement en 2008 qu'il a pu être physiquement mis en œuvre pour la première fois. De quoi s'agit-il ? D'un composant qui acquiert une certaine résistance lorsqu'il est traversé par un courant et, plus étonnant, qui, même après avoir été déconnecté, conserve une certaine mémoire du flux des charges qu'il a pu recevoir dans le passé.

    Grâce à des memristors, les ingénieurs pourraient développer un nouveau type de mémoire pour nos ordinateursordinateurs. En effet, les mémoires actuelles sont incapables de retenir l'information une fois l'ordinateur éteint. Au redémarrage, la récupération des données sur le disque magnétiquedisque magnétique est plus ou moins lente et consommatrice d'énergie. Les memristors pourraient permettre d'éviter cette étape pour gagner en efficacité.

    Les chercheurs de l'université de Kiel ont, de leur côté, cherché à utiliser les memristors pour imiter le fonctionnement du cerveau humain. Ils ont ainsi relié entre eux deux oscillateurs à l'aide de memristors. Les oscillateurs - un peu à l'image de ce que font les neurones - produisent des signaux électriques périodiques. Les chercheurs ont pu observer que ces signaux - à l'origine indépendants les uns des autres - se sont peu à peu synchronisés... comme cela peut être observé dans notre cerveau !