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La double hélice qu'on ne présente plus... Crédit : Antonio H. Castro Neto
On ne présente plus l'ADNADN, la célèbre molécule de la vie. On sait peu, en revanche, que son rôle biologique de support de l'information génétiquegénétique avait été anticipé par le physicienphysicien Erwin SchrödingerErwin Schrödinger, l'un des fondateurs de la mécanique quantique. De plus, beaucoup de travaux en biologie moléculairebiologie moléculaire ont fait intervenir les méthodes de la physique, comme la diffraction de rayons X. De nos jours, l'ADN continue à susciter l'attention et même la fascination des physiciens.
En particulier, ils étudient ses propriétés conductrices afin d'utiliser l'ADN pour construire de minuscules circuits électroniques et même des ordinateursordinateurs miniaturisés. Toute une électronique moléculaire s'est ainsi construite autour de la célèbre double hélice. Une autre conséquence possible de cette recherche, selon les biophysiciensbiophysiciens, est de comprendre comment les enzymesenzymes reconnaissent les dommages subis par l'ADN. C'est de la plus haute importance pour comprendre l'origine des cancerscancers et ainsi, peut-être, mieux apprendre à les prévenir et les soigner.
Il se trouve que les travaux sur la conductivitéconductivité de l'ADN ont fourni des résultats parfois contradictoires, et même mystérieux. En fait, la plupart des études se sont concentrées sur les transports d'électronsélectrons par les bases azotéesbases azotées montées sur le squelette de l'ADN, formé d'une succession de groupements phosphatés et de sucressucres. Presque rien n'a été fait sur les propriétés conductrices du squelette lui-même.
Léon Brillouin et la conductivité de l'ADN
Pourtant, peu après la découverte de la structure en double hélice par Watson et Crick en 1953, le grand physicien français Léon Brillouin, bien connu pour ses travaux de mécanique quantique appliqués à la conduction des électrons dans les solidessolides cristallins, avait fait une constatation intéressante.
Crédit : AIP Emilio Segre Visual Archives
Le squelette lui-même avec, son alternance de molécules d'acideacide phosphorique et de désoxyribosedésoxyribose, représente une structure périodique, comme dans un cristal. On pouvait donc s'attendre à ce que la conduction y soit possible. Cette remarque n'avait pas eu l'écho qu'elle méritait, probablement parce que les bases elles-mêmes, montées sur le squelette, introduisaient une structure rappelant celle du graphitegraphite : un excellent conducteur. C'est donc au niveau de ces dernières que la majorité des études sur la conductivité de l'ADN ont été menées.
La conductivité du squelette de l'ADN
Tetsuhiro Sekiguchi de la Japan Atomic Energy Agency et Hiromi Ikeura-Sekiguchi de l'AIST Research Center ont donc entrepris d'étudier la question de la conductivité du squelette de l'ADN et c'est en utilisant une autre découverte faite par un Français qu'ils ont été les premiers à mesurer la façon dont les électrons s'y déplacent. Ils ont fait appel à la technique de la spectroscopie Auger.
Pierre Auger. Crédit : Esa
Lorsqu'on soumet un atomeatome à un faisceau de rayons X ou d'électrons de haute énergieénergie, l'atome peut perdre par ionisationionisation un électron d'une couche profonde, proche de son noyau. Un trou se produira donc dans cette couche et un électron d'une autre couche de l'atome aura tendance à venir le remplacer en provoquant l'émissionémission d'un photonphoton. Celui-ci pourra à son tour éjecter un second électron, que l'on appelle un électron Auger. En mesurant l'énergie de ce dernier, on peut étudier les propriétés physiques et chimiques des surfaces des matériaux.
Dans le cas présent, les chercheurs japonais ont utilisé un faisceau de rayons X pour exciter les électrons des atomes de phosphorephosphore dans le squelette de l'ADN. En mesurant les caractéristiques des électrons Auger émis, les chercheurs ont pu déterminer si des électrons s'étaient déplacés par conduction le long du squelette et à quelle vitessevitesse. Ils ont effectivement trouvé qu'un processus de conduction se produisait bien, et avec une vitesse pour les électrons un millier de fois plus rapide au niveau du squelette qu'au niveau des bases.
Là est probablement la clé qui explique les résultats anormaux et contradictoires que l'on avait obtenus jusqu'ici au sujet des propriétés conductrices de l'ADN.