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Convertir du dioxyde de carbonedioxyde de carbone (CO2) en éthylène, en éthanol ou même en propanol, cela peut se faire. Mais l'efficacité de l'opération ne la rend pas suffisamment intéressante. Sauf à s'appuyer sur les développements mis au point par des chercheurs du Lawrence Berkeley National Laboratory (États-Unis).
Le premier développement en question est un catalyseur à base de nanobilles de cuivre qui permettrait, à lui seul, de gagner (à son niveau) 30 % en efficacité énergétique. Étroitement disposées, ces nanoparticulesnanoparticules de cuivre (7 nanomètres de diamètre) forment, dès le début de la réaction, des structures cubiques un peu plus grandes (10 à 40 nanomètres). Et il semblerait que ce soit ce changement de structure du catalyseur qui facilite la formation de molécules d'intérêt à partir de CO2.
Ce schéma présente l’action du catalyseur développé par les équipes du Berkeley Lab. Ce dernier se trouve d'abord sous forme de nanobilles de cuivre (à gauche sur le schéma) ; il subit une transformation structurelle et prend ensuite une forme de cubes (à droite). Le CO2 injecté (à droite) est alors transformé en éthylène, en éthanol et en propanol (Ethylene, Ethanol et n-Propanol, en anglais sur le schéma). En haut à gauche, des images du catalyseur au microscope électronique à transmission. © Dohyung Kim, Berkeley Lab
Le cuivre au cœur du processus
Autre développement proposé : une cathode bimétallique (cuivre-argentargent) structurée en forme de nanocorail et une anodeanode en nanotubesnanotubes d'iridiumiridium. La présence d'argent participerait à la réduction du CO2 en monoxyde de carbonemonoxyde de carbone. La présence de cuivre provoquerait la formation d'éthylène et d'éthanol notamment. Le tout diviserait l'apport énergétique nécessaire à la réduction électrochimique par deux.
De plus, la structure nanométrique de ces anodes permet au système de fonctionner efficacement dans des conditions de pH neutre (eau), ce qui facilite la dissolution du CO2. Elle le permet aussi lorsque le système est conjugué à des panneaux solaires dans des conditions d'ensoleillement allant jusqu'à 35 % seulement du maximum.
La photosynthèse artificielle, c'est quoi ?
Article de Nathalie MayerNathalie Mayer, paru le 08/12/2015
Une équipe d'ingénieurs du groupe allemand SiemensSiemens a annoncé avoir mis au point un module capable de convertir du dioxyde de carbone (CO2) en composés organiques utiles pour l'industrie, mettant ainsi en œuvre une sorte de photosynthèsephotosynthèse artificielle.
Selon les spécialistes, les plantes qui recouvrent la surface du globe produisent, chaque année, par photosynthèse, environ 150 milliards de tonnes de biomassebiomasse riche en énergieénergie. Un chiffre qui explique pourquoi ce processus biologique intéresse particulièrement les chercheurs. Une équipe de Siemens Corporate Technology (Munich) semble d'ailleurs avoir fait un grand pas vers ce qui pourrait devenir des modules de photosynthèse artificielle.
Pour fonctionner, ces modules utilisent les excédents d'électricité produits par des sources d'énergies renouvelables intermittentes (solaires ou éolienneséoliennes). Ils pourraient, à l'avenir, venir recouvrir les bâtiments, capter le dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphèreatmosphère et le transformer, à partir de l'énergie solaire, en produits chimiques comme le méthanol.
Rappelons que la photosynthèse est une réaction chimique particulièrement efficace. Les plantes, grâce à la chlorophyllechlorophylle, la mettent en œuvre afin de transformer le CO2, présent dans l'atmosphère, en substances organiques riches en énergie, des sucressucres notamment. Le tout en s'appuyant sur l'énergie solaire et l'eau qu'elles puissent dans leur environnement. Un processus biologique qui suscite bien des intérêts mais qui n'a encore jamais pu être copié, à cause de sa sophistication. Il implique en effet de multiples moléculesmolécules, dont des enzymesenzymes, réunies dans un mécanisme complexe.
Les modules développés par les ingénieurs de Siemens ne sont pas plus grands que des boîtes à chaussures. À partir de CO2, ils permettent d'initier des réactions chimiquesréactions chimiques semblables à celles qui ont lieu au cœur des cellules végétales. Et, selon les conditions initiales, ces modules produisent :
- soit de l'éthylène, qui sert à l'industrie chimique pour la fabrication de matières plastiques ;
- soit du méthane, un gazgaz riche en énergie ;
- soit du monoxyde de carbone qui peut servir à produire des carburants de type éthanol.
Grâce à des catalyseurs chimiques spécifiquement développés pour leur application, des ingénieurs du groupe Siemens ont mis au point un module qui permet de synthétiser de la matière organique à partir d’eau et de dioxyde de carbone. Un premier pas vers la photosynthèse artificielle. © uncoolbob, Flickr, CC by-nc 2.0
Des catalyseurs chimiques pour charger le CO2 en électrons
Comment fonctionnent ces réactions ? Du CO2 mélangé à de l'eau est injecté dans une cellule électrolytique. Ensuite, il suffit de laisser opérer la magie de la photosynthèse. Ou presque. Parce que le projet des chercheurs de Siemens repose quand même essentiellement sur la mise en œuvre de catalyseurs chimiques capables de charger le CO2 en électronsélectrons de haute énergie et, de fait, de l'activer chimiquement. La difficulté, c'est que ces nouveaux catalyseurs doivent charger le CO2 de manière sélective. Car s'ils venaient à charger également les molécules d'eau, la réaction chimique qui s'en suivrait produirait simplement de l'hydrogènehydrogène.
Avec l'aide de plusieurs équipes universitaires de spécialistes des sciences de la matièrematière, les ingénieurs allemands ont notamment pu développer des catalyseurs à base de cuivre qui permettent d'atteindre des rendements plus qu'intéressants en matière de production de monoxyde de carbone : pas moins de 95 % de l'énergie électrique se retrouve sous forme de gaz. Après modification des conditions initiales (changement dans la nature des sels dissous dans l'eau, par exemple), d'autres se sont révélés très efficaces dans la conversion du CO2 en divers autres composés organiques.
Pour des raisons de rentabilité, les ingénieurs de Siemens se concentrent sur la production de composés à forte valeur ajoutée pour l'industrie chimique qui dépend aujourd'hui encore largement de matières premières issues du pétrolepétrole. Reste désormais à passer au stade du démonstrateurdémonstrateur industriel. Ceci devrait être fait dans les prochaines semaines.
Avec l’aide de matériaux de type panneaux solaires photovoltaïques, les ingénieurs de Siemens espèrent mettre en œuvre le processus complet de photosynthèse artificielle. © a2lineee, Flickr, CC by-nc-nd 2.0
Capter l'énergie solaire de manière autonome
En parallèle, les chercheurs allemands continuent d'étudier un moyen pour permettre à leurs modules de capter l’énergie solaire et de fonctionner de manière autonome. De quoi réaliser une véritable photosynthèse artificielle, en d'autres termes. Peut-être y parviendront-ils grâce à des modules conçus à partir des mêmes matériaux que ceux employés pour la constructionconstruction de cellules photovoltaïques. La lumièrelumière serait captée par le haut pendant que le CO2 pénètrerait par le bas. Puis, plutôt que de chercher vainement à reproduire le procédé complexe mis en œuvre par les molécules de chlorophylle, les ingénieurs de Siemens songent à utiliser des particules semi-conductrices qui seraient encapsulées par les fameux catalyseurs. De quoi, espèrent-ils, produire des électrons à haute énergie et les transférer au CO2 en quelques fractions de seconde seulement.
Les chercheurs allemands affirment que leur technologie devrait être mature d'ici deux ans seulement. Leurs petites usines biochimiques devraient d'abord fonctionner à partir du CO2 récolté à la sortie des usines. Puis elles devraient pouvoir s'attaquer directement au CO2 excédentaire présent dans l'atmosphère grâce à des sortes d'éponges à CO2, elles aussi en cours de développement.