Il y a quelques années déjà, une équipe américaine avait imaginé une mémoire Flash intégrant du graphène. Objectif : en réduire les dimensions bien au-delà de celles que nous connaissons. Aujourd’hui, une autre équipe annonce avoir mis au point un interrupteur moléculaire qui pourrait en constituer l’élément de base.

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    Pour miniaturiser toujours plus des systèmes électroniques, les chercheurs en nanotechnologies espèrent développer des composants basés sur des moléculesmolécules uniques. Et pour y parvenir, ils devront être capables de contrôler précisément les propriétés des molécules en question. Ou a minima, certaines d'entre elles.

    Or justement, une équipe internationale (université de Californie à Berkeley, États-Unis et Imperial College London, Royaume-Uni) annonce, dans le dernier numéro de Nature Communications, être parvenue à contrôler l'état de charge d'une molécule organique liée à une feuille de graphènegraphène.

    Des chercheurs sont parvenus à contrôler l’état de charge d’une molécule organique (en bleu, vert, rouge et jaune) liée à une feuille de graphène (structure jaune en nid d’abeille). © <em>Imperial College London</em>

    Des chercheurs sont parvenus à contrôler l’état de charge d’une molécule organique (en bleu, vert, rouge et jaune) liée à une feuille de graphène (structure jaune en nid d’abeille). © Imperial College London

    Un interrupteur moléculaire pour une mémoire miniature

    En contrôlant la charge électrique d'une molécule, celle-ci peut être utilisée comme une sorte d'interrupteur. La succession de positions « on » et « off » de différents interrupteurs peut alors coder de l'information et permettre de la stocker. Et en utilisant ce type d'interrupteur moléculaire, il devient possible d'imaginer des mémoires Flash nouvelle génération et ultra miniaturisées.

    Dans leur étude, les chercheurs américains et britanniques ont placé une molécule organique de tétrafluoro-tétracyanoquinodiméthane (F4-TCNQ) sur une feuille de graphène. Ils ont ensuite augmenté la densité électronique du graphène en lui appliquant un champ électriquechamp électrique. À l'aide de techniques de spectroscopie tunnel à balayage et de microscopie à force atomique, ils ont pu observer que le graphène avait tendance à céder une partie de ses électronsélectrons à la molécule, influant son état de charge de manière prévisible.


    Un prototype de mémoire Flash au graphène

    Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet, paru le 06/09/2011

    Une équipe américaine est parvenue à installer un élément en graphène dans une cellule mémoire de type Flash. Intérêt : le procédé permettra - un jour -  de réduire les dimensions au-delà de ce que l'on peut faire avec du siliciumsilicium.

    En tentant de réduire la taille des circuits électroniques, des limites physiquesphysiques apparaissent et il faut alors changer de technique. Par exemple, l'effet tunneleffet tunnel, qui transforme les électrons en passe-muraille, ennuie les électroniciens. Mais ils ont su aussi en tirer profit en mettant au point les « grilles flottantes » des mémoires Flash, celles des clés USB et de ces petites cartes destinées aux appareils photo, dont les capacités croissent régulièrement au fil des années.

    Mais là aussi il y a une limite : lorsque l'on réduit la taille d'une cellule mémoire (dont la structure ressemble à celle d'un transistor), cette grille flottante, qui retient les électrons, et donc l'information, au moment de l'opération d'écriture, ne peut être affinée dans les mêmes proportions. Trop peu épaisse, elle laissera fuir les électrons et l'information avec eux.

    Il y a encore de la marge et les fabricants de mémoires Flash ont encore quelques années de progrès possibles dans la miniaturisation. Mais dans les laboratoires, il est temps de penser à la suite. Parmi les pistes explorées figurent des options très différentes des solutions actuelles.

    Certains cherchent du côté de l'électronique de spinélectronique de spin, par exemple, ou spintronique, qui consiste à utiliser le spin des électrons (une propriété quantique) pour y stocker de l'information. D'autres veulent exploiter le spin des noyaux d’atomes pour en faire des cellules mémoire...

    Des chercheurs de l'université de Californie à Los Angeles (plus connue sous le nom de l'Ucla), associés à d'autres employés chez SamsungSamsung, travaillent sur une solution s'appuyant à la fois sur les techniques actuelles de fabrication des circuits et sur une star des labos : le graphène. Cette feuille monoatomique de carbonecarbone, de la même nature que la paroi des nanotubes de carbonenanotubes de carbone, présente en effet des caractéristiques qui passionnent les physiciensphysiciens. En 2009, Feng Wang et ses collègues de l'université de Berkeley en Californie ont même affirmé qu'il est possible du faire du graphène un semi-conducteur.

    Schéma succinct des cellules mémoire du prototype de mémoire Flash au graphène. Sur une base de silicium (<em>Si</em>) ont été installés une feuille de graphène puis les autres composants des cellules (<em>Gate</em>), la jonction (<em>Tunnel Oxide</em>) et la grille de contrôle (<em>Controle Oxide</em>). Par rapport au silicium, le graphène apporte de meilleures performances (consommation, épaisseur, tenue de l'information dans le temps). © Augustin J. Hong <em>et al.</em>

    Schéma succinct des cellules mémoire du prototype de mémoire Flash au graphène. Sur une base de silicium (Si) ont été installés une feuille de graphène puis les autres composants des cellules (Gate), la jonction (Tunnel Oxide) et la grille de contrôle (Controle Oxide). Par rapport au silicium, le graphène apporte de meilleures performances (consommation, épaisseur, tenue de l'information dans le temps). © Augustin J. Hong et al.

    Le graphène : mince, conducteur et étonnant

    L'équipe de l'Ucla a fait plus simple : installer une minuscule pastille de graphène en lieu et place de la grille flottante en silicium d'une mémoire de type Flash. L'ensemble du circuit est donc conventionnel, à la différence qu'une couche de graphène est ajoutée entre les électrodesélectrodes et la grille de contrôle. Le procédé de fabrication ne diffère guère de celui d'un circuit classique.

    La faible épaisseur de la grille flottante (puisqu'elle est celle d'un seul atomeatome, donc) permet une réduction de taille, du moins potentiellement puisque l'équipe n'en est qu'au prototype, où la dimension des cellules se mesure en micromètresmicromètres. Cette mémoire Flash au graphène, que les auteurs nomment une GFM (Graphene Flash Memory), présente d'autres avantages : les propriétés électriques du graphène apportent une meilleure efficacité, avec, explique la publication dans ACS Nano, une consommation inférieure à celle du composant tout en silicium et une meilleure tenue dans le temps.

    D'après l'équipe, l'introduction d'un élément en graphène ne serait pas une grosse difficulté pour les industriels du circuit électronique et permettrait d'aller plus loin que prévu dans la miniaturisation des mémoires Flash. La progression des capacités pourra ainsi se poursuivre bien au-delà du téra-octet sur les petites cartes à glisser dans les appareils photo, smartphones ou caméras...