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« It's time for me to say goodbye » (« Il est temps pour moi de dire au revoir ») tweettait le 26 juillet (le service de communication de) Philae. Le célèbre petit robotrobot, dont l'atterrissage rocambolesque sur le petit lobe de 67P/Tchouryumov-Gerasimenko (alias Tchouri) défraya la chronique le 12 novembre 2014, trois mois après l'arrivée de la sonde Rosetta autour de la comète, est resté désespérément muet depuis le 9 juillet 2015.
Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir tenté de communiquer avec lui. D'ailleurs, il y eut plusieurs reprises de contact en juin et juillet 2015. Mais les principaux obstacles furent sa localisation et sa position sur le sol. Certes, l'ensoleillement de Tchouri était alors croissant, à mesure qu'elle rejoignait le point de son orbite le plus proche du Soleil (le périhélie était le 13 août 2015, à 186 millions de kilomètres). Mais cet apport d'énergie solaire est resté insuffisant, d'autant plus que RosettaRosetta devait s'écarter davantage de l'astre en pleine effervescence. Le repos éternel de Philae sur le site d'Abydos fut déclaré le 12 février 2016. Toutefois, le retour de Rosetta à basse altitude (jusqu'à 10 km) ces derniers mois, entretint un ultime espoir de pouvoir reprendre le contact avec l'atterrisseur.
Aujourd'hui, 27 juillet, à 11 h, heure de Paris, l'unité qui permettait de communiquer avec Philae à bord de la sonde de l'Esa, l'ESS (Electrical Support System), a été éteinte définitivement. L'événement prélude à la fin programmée de Rosetta, prévue le 30 septembre prochain. En effet, la sonde qui accompagne la comète depuis le 6 août 2014, tout au long de son orbite elliptique, reçoit de moins en moins d'énergie à mesure qu'elle s'éloigne du Soleil.
Distante actuellement de 520 millions de kilomètres de notre étoileétoile, elle perd quelque 4 wattswatts par jour. Aussi, pour maximiser la prise de données avec les instruments au cours des deux mois qui restent, les ingénieurs ont-ils préconisé de réduire la consommation d'énergie en arrêtant les appareils qui ne sont plus prioritaires. Au-delà de 600 millions de kilomètres, il deviendra très difficile pour Rosetta de travailler dans les conditions extrêmes auxquelles elle sera soumise. D'où la décision de la poser sur la comète.
La comète Tchouri photographiée par la caméra de navigation de Rosetta, le 14 mars 2015, à 85,7 km de distance. La région Ma’at, où se posera Rosetta le 30 septembre, se situe sur le plus petit des deux lobes du noyau cométaire. © Esa, Rosetta, NavCam, CC BY-SA IGO 3.0
« Un ultime baiser à la comète »
Comme nous l'expliquions récemment, pour achever sa mission, Rosetta se posera sur la comète. Sur la surface accidentée de ce corps bilobé d'un peu plus de 4 km de longueur, l'opération ne sera pas sans risque. Quoi qu'il en soit, les équipes savent pertinemment qu'après cette étape, la sonde ne donnera plus jamais de nouvelles ; en effet, les chances que son antenne à haut gain ne subisse pas de dommages et soit dirigée vers la Terre sont vraiment très réduites.
Le site d'atterrissage est désormais connu. Il répond autant aux contraintes techniques qu'aux demandes des scientifiques. Ce sera la région de Ma'at. Abritant plusieurs fosses actives, elle s'étend sur le plus petit des deux lobes du noyau cométaire, non loin de Hatmehit et du site Agilkia qui devait accueillir initialement Philae (voir Comet viewer, la carte interactive de Tchouri proposée par l'Esa).
Le 30 septembre, Rosetta descendra à une vitessevitesse deux fois inférieure à celle de Philae, soit environ 50 centimètres par seconde, et devrait toucher le sol à 12 h 30. L'Esa donnera plus de détails sur le déroulement des opérations ultérieurement.
Ce qui est certain, c'est que la sonde profitera de sa grande proximité avec la comète Tchouri, qu'elle accompagne depuis deux ans pour livrer des images et des mesures plus intimes que jamais, en haute résolutionrésolution, jusqu'au dernier moment.
À l'annonce du sort réservé à Rosetta, le président du Cnes, Jean-Yves Le Gall, avait déclaré « [cela] peut paraître un peu triste, vu à quel point le monde entier s'est ému de cette mission incroyable, allant jusqu'à personnifier Rosetta et Philae. Mais c'est pour eux deux la plus belle des fins de mission avec à la clé la possibilité d'effectuer de nouvelles mesures et des prises de vue au plus près de la comète, qui permettront d'apporter de nouvelles données originales pour la communauté scientifique mondiale. Et quelle plus belle fin pour Rosetta que de donner un ultime baiser à sa comète ! »