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Un des premiers astres à briller au crépuscule, cet été, est la planète géante Jupiter (en direction du sud, impossible aussi de manquer Mars la rouge). On peut l'admirer au sein de la constellation du Lion, plongeant vers l'horizon ouest. Elle est actuellement à quelque 856 millions de kilomètres de la Terre, soit 47 minutes-lumière (à titre de comparaison, la plus proche étoileétoile, Proxima du CentaureProxima du Centaure, est à 4,2 années-lumièreannées-lumière).
Ce 5 juillet, après un long voyage de cinq ans et 2,7 milliards de kilomètres, Juno vient de s'insérer en orbiteorbite autour de Jupiter (vous pouvez visualiser la trajectoire de Juno via Nasa’s Eye). Voilà presque 20 ans, depuis GalileoGalileo, que la plus grosse planète du Système solaireSystème solaire n'avait pas reçu la visite d'un vaisseau d'exploration qui lui soit entièrement dédié. À la différence de son prédécesseur, celle-ci aura les yeuxyeux exclusivement rivés sur la planète et ses entrailles. En effet, à l'instar de ce que raconte la mythologie gréco-romaine au sujet de la déesse Junon-Héra qui tente de percer les secrets de son époux volage à travers le voile dont il s'est entouré, nous, simples mortels, allons tenter de savoir ce que nous cache JupiterJupiter alias Zeus, sous ses épaisses couches nuageuses.
Bande-annonce de la nouvelle superproduction de la Nasa : la sonde Juno qui, le 4 juillet, s’installera en orbite polaire autour de Jupiter. © Nasa, JPL-Caltech
Si Jupiter avait la taille d’un ballon de basket, Juno la survolerait à… 1 cm
Au moyen des neuf instruments embarqués, les astronomesastronomes souhaitent déterminer la composition et la structure interne de ce corps de 318 massesmasses terrestres, le premier à s'être formé autour du SoleilSoleil dans le disque protoplanétaire de gazgaz et de poussière. Sans doute conserve-t-il dans ses profondeurs des indices sur les conditions qui régnaient alors.
JunoJuno a 18 mois pour cartographier et le champ magnétiquechamp magnétique et le champ gravitationnel de la planète, sur une orbite polaire très rapprochée. « Jamais un vaisseau ne se sera approché aussi près de Jupiter, a déclaré au journal du CNRS, Philippe Zarka, co-investigateur de la mission, à peine 10.000 kilomètres au-dessus des pôles, 5.000 kilomètres au-dessus de l'équateuréquateur. Si on réduisait la planète à la taille d'un ballonballon de basket, la sonde s'en approcherait à moins d'un centimètre ! » Un point de vue exceptionnel qui permettra de balayer « toute la surface de la planète, [et] entre chaque survolsurvol des pôles, de passer sous les ceintures de radiation qui s'étendent de part et d'autre de l'équateur, le long des lignes du champ magnétique jovienjovien ».
Jupiter et ses quatre satellites galiléens (Io, Europe, Ganymède et Callisto), imagés le 21 juin à 10,9 millions de kilomètres de distance avec l’instrument JunoCam de la sonde Juno. © Nasa, JPL-Caltech, SwRI, MSSS
« Cette image est le commencement de quelque chose de grand »
La sonde de 3,6 tonnes a allumé son moteur principal durant 35 minutes pour réduire sa vitessevitesse par rapport à Jupiter et s'incrire sur une orbite polaire de 53,5 jours, provisoire. L'engin n'a pas encore pris d'image mais a envoyé un signal à 3 h 53 (TU, soit 5 h 53 en heure française), indiquant la réussite de la manœuvre. Sur son orbite polaire, qui sera réduite à 14 jours en octobre prochain avec une altitude plus faible, Juno fournira des informations sur la haute atmosphèreatmosphère de Jupiter ainsi que sur son puissant champ magnétique.
Avant son arrivée, la sonde a réalisé quelques images, comme ce portrait de famille (photo ci-dessus), réalisé avec l'instrument optique JunoCam le 21 juin dernier, alors que le vaisseau était à près de 11 millions de kilomètres de cette planète 13 fois plus grande que la nôtre. Cela s'apparente à ce qu'on peut voir dans un petit télescopetélescope sur Terre, à la différence notable toutefois que le point de vue sur le système change. Il n'est plus du tout dans le plan équatorial. « Cette image est le commencement de quelque chose de grand, s'enthousiasme le chercheur. À l'avenir, nous allons voir les aurores polairesaurores polaires de Jupiter à partir d'un nouveau point de vue. Nous verrons des détails comme jamais auparavant de l'enroulement des bandes de nuagesnuages orange et blancs, et même la Grande tache rouge. » Les opérateurs de la mission préviennent : les premières images de JunoCam ne devraient pas être publiées avant... la fin d'août ou le début de septembre.
À gauche : Jupiter imagée dans l’infrarouge avec l’instrument Visir installé sur le VLT ; à droite : Jupiter photographié au même moment, mais dans le visible, par l’astronome amateur Damian Peach. © Eso, L. N. Fletcher, Damian Peach
Les entrailles de Jupiter vues de la Terre
À l'occasion des Rencontres nationales d’astronomie organisée par la Royal Astronomical Society du Royaume-Uni, à l'université de Nottingham, du 27 juin au premier juillet, des astronomes ont dévoilé une série exceptionnelle d'aperçus de l'intérieur de la géante, réalisés par des observatoires terrestresobservatoires terrestres, principalement au Chili et à Hawaï, avec la contribution d'astronomes amateurs du monde entier. « Ces cartes guideront les observations de Juno au cours des prochains mois, a précisé Leig Fletcher, qui a initié ce programme. Des images acquises à différentes longueurs d'ondelongueurs d'onde du spectrespectre infrarougeinfrarouge nous permettent de reconstituer, en trois dimensions, les mouvementsmouvements d'énergieénergie et de matièrematière au travers d'une colonne d'atmosphère. »
Pour les astronomes, il a fallu bien sûr composer avec l'agitation incessante de notre atmosphère. C'est pourquoi les images dites « chanceuses », c'est-à-dire les moins affectées par la turbulenceturbulence, parmi la multitude prises avec l'instrument Visir installé sur le VLT (Very Large TelescopeVery Large Telescope), ont été conservées puis superposées pour offrir ces portraits sensationnels dans l'infrarouge.
« Les résultats d'observation de Juno, combinés aux données de Visir, a expliqué à l'Eso, Glenn Orton, responsable de la campagne au sol à l'appui de la sonde spatiale, permettront aux chercheurs de caractériser la structure thermique globale de Jupiter, sa couverture nuageuse ainsi que la distribution des espècesespèces gazeuses. »
Jupiter, sans qui, sans doute, nous ne serions pas là (lire notre article : La vie sur Terre doit dire merci à Jupiter et à Saturne), ne devrait bientôt plus avoir beaucoup de secrets pour nous. Les données scientifiques et les images promettent d'être sensationnelles.