Une bien curieuse observation montre des sursauts gamma semblant former un gigantesque anneau de 5 milliards d'années-lumière de diamètre. Le modèle standard de la cosmologie, qui interdit les structures de plus de 1,2 milliard d'années-lumière, est-il pris en défaut ?

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    Il n'est probablement pas exagéré d'affirmer que la cosmologie est entrée dans une ère de précision depuis une bonne dizaine d'années, notamment grâce aux missions WMap et PlanckPlanck, ou encore le Baryon Oscillation Spectroscopic Survey (Boss). Le modèle dit de concordance, qui repose sur l'existence de la matière noirematière noire froide et de l'énergie noire, est donc devenu le modèle standard de la cosmologiemodèle standard de la cosmologie. On considère généralement aussi qu'il fait intervenir une phase d'inflation primordiale, bien que manque encore la détection des ondes gravitationnelles produites par cette phase.

    Ce modèle peut se targuer de nombreux succès, comme l'a expliqué il y a deux ans le grand cosmologiste James Peebles à l'occasion des 75 ans de l'IAP. Mais quelques-unes de ses prédictions rendent parfois les astrophysiciensastrophysiciens perplexes confrontés à des observations qui semblent les contredire. C'est par exemple le cas des galaxies naines d’Andromède. S'agit-il d'une mauvaise compréhension du modèle standard ou de la pointe émergée d'une nouvelle physique ? Voire d'un certain changement de paradigme en cosmologie, sans aller jusqu'à remettre en question le Big Bang.

    La dernière découverte en date provient d'une équipe d'astronomesastronomes hongrois et états-uniens qui viennent de publier un article disponible en ligne sur arxiv. Il concerne la découverte de ce qui semble être un anneau géant de sursauts gamma (ou GRB, pour Gamma Ray Bursts). Rappelons que ces sursauts sont supposés être le produit d'explosions d'étoilesétoiles sous forme d'hypernovaehypernovae ou bien de collisions d'étoiles à neutronsétoiles à neutrons. Dans le cas présent, les chercheurs ont constaté que 9 sursauts gamma, tous situés à environ 7 milliards d'années-lumièreannées-lumière de la Voie lactée, formait une sorte d'anneau dont le diamètre angulaire sur la voûte céleste est d'environ 36°, ce qui représente en gros 70 fois le diamètre de la pleine Lunepleine Lune. Un calcul simple montre que cette structure doit s'étendre sur plus de 5 milliards d'années-lumière.

    Ces cartes montrent le ciel observé en rayons gamma au-dessus de 100 MeV par l'instrument LAT du satellite Fermi. À gauche, le ciel trois heures avant l'occurrence du sursaut gamma GRB 130427A. À droite, une carte établie 30 minutes après l'explosion. GRB 130427A était situé dans la constellation du Lion, près de sa limite avec la Grande Ourse. © Nasa, DoE, Fermi LAT Collaboration

    Ces cartes montrent le ciel observé en rayons gamma au-dessus de 100 MeV par l'instrument LAT du satellite Fermi. À gauche, le ciel trois heures avant l'occurrence du sursaut gamma GRB 130427A. À droite, une carte établie 30 minutes après l'explosion. GRB 130427A était situé dans la constellation du Lion, près de sa limite avec la Grande Ourse. © Nasa, DoE, Fermi LAT Collaboration

    Une fluctuation statistique dans la répartition des GRB ?

    Il faut se méfier des structures qui apparaissent dans le ciel. Certaines associations troublantes d'astresastres ne sont parfois que des effets de perspectives ou de simples manifestations du hasard. Les constellationsconstellations en sont un bel exemple. Cependant, ces sursauts sont des objets situés à des distances similaires et qui ont explosé durant une même période de temps de l'ordre de 250 millions d'années, ce qui est peu à l'échelle du cosmoscosmos. Il est possible d'évaluer les chances que de simples fluctuations statistiques aient produit cet anneau : de l'ordre de 1 sur 20.000.

    Du point de vue de la cosmologie standard, comme nous allons le voir, il s'agit d'une anomalieanomalie. Elle est encore statistiquement trop faible pour parler d'une découverte mais suffisamment forte pour mériter un examen approfondi. Si cet anneau correspond bien à une structure sphérique, il pourrait être un ensemble de galaxiesgalaxies hébergeant des sursauts gamma et se trouvant dans les filaments de matière qui entourent ces immenses régions presque vides en galaxies, connues depuis des décennies.


    Cette vidéo introduit la simulation Millenium Run, qui représente l'évolution d'une partie de l'univers dans le temps. © ABLReebok2009, YouTube

    Ou un problème pour le Principe Cosmologique ?

    Mais avec 5 milliards d'années-lumière de diamètre, cette structure est bien plus grande que la taille moyenne des vides observés jusqu'ici et que reproduisent des simulations comme celle du Millénaire. D'un point de vue théorique, la taille maximale des structures observables devrait être de 1,2 milliard d'années-lumière. Il s'agit donc, si elle se confirme, d'une inhomogénéité de la répartition de la matière à une échelle où est censé s'appliquer le fameux Principe Cosmologique. Il stipule qu'à partir d'une certaine échelle de distance (indéterminée a priori), la distribution de matière et d'énergie est identique en tout lieu dans le cosmos observable. Ce postulatpostulat, jusqu'ici vérifié par les observations, permet de simplifier considérablement les équationséquations de la relativité généralerelativité générale et donc de travailler en cosmologie en s'épargnant des calculs faramineux.

    Ce n'est pas la première fois que des structures semblent remettre en cause l'échelle d'applicationapplication du Principe Cosmologique. Ce fut le cas, par exemple, il y a deux ans avec la découverte d'une sorte de filaments de quasars longs de 4 milliards d'années-lumière. Si toutes ces structures sont bien réelles, il faudra sans doute élucider l'origine de leur apparition des centaines de millions d'années après le Big BangBig Bang. Il est difficile de savoir quels ingrédients permettront de le faire : une meilleure compréhension de la théorie standard de la formation des grandes structures, une nouvelle physique ? Il faut en effet garder à l'esprit que les observations de Planck montrent, elles, et avec une précision époustouflante, que 380.000 ans environ après sa « naissance », l'universunivers devait être homogène et isotropeisotrope.