Trois ans après le survol historique de Pluton par la sonde New Horizons, des chercheurs dévoilent les cartes officielles de la planète naine et de son compagnon Charon. Deux ans de travail méticuleux pour produire ces cartes topographiques très détaillées. Grâce à elles, les scientifiques peuvent mieux comprendre ce qui a façonné ce monde glacé à la grande diversité des reliefs.

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    Avant le 14 juillet 2015, personne ne savait à quoi ressemblait la surface de Pluton. Depuis sa découverte en 1930, la planète naine est souvent restée un point pâle et flou dans les télescopes qui pourtant devenaient toujours plus puissants, décennie après décennie. Puis, enfin, après un voyage à vive allure, une sonde entra dans le domaine de l'ex-neuvième planète, accompagnée de CharonCharon (découverte il y a 40 ans) et leurs petites lunes. Rappelons combien ce fut un spectacle extraordinaire, et pour l'équipe de la mission New HorizonsNew Horizons et pour tous les Terriens, de découvrir le vrai visage de PlutonPluton. Nul alors ne soupçonnait une telle variété de paysages : des plaines, des vallées, des montagnes, des crevasses et aussi ce qui ressemble à des volcansvolcans de glace, etc.

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    Trois ans après, tandis que le vaisseau d'exploration New Horizons poursuit son aventure, fonçant vers l'astéroïde de la ceinture de Kuiper, Ultima ThuléUltima Thulé (2014 MU69, de son vrai nom, est à quelque 6,3 milliards de kilomètres de la Terre) qu'il survolera dans moins de six mois, le 1er janvier 2019, des chercheurs viennent de publier les premières cartes topographiques officielles de Pluton et de Charon, son compagnon. Un travail de longue haleine qui a demandé pas moins de deux ans à l'équipe dirigée par Paul Schenk, chercheur à la LPI (Lunar and Planetary Institute), pour assembler et aligner les vues acquises par les instruments Lorri (Long Range Reconnaissance Imager) et Mvic (Multispectral Visible Imaging CameraMultispectral Visible Imaging Camera) qui équipent la sonde spatiale.

    Voici Tenzing Montes, les plus hautes montagnes de Pluton. Vue en perspective de la chaîne de montagne située sur la bordure ouest de la plaine Spoutnik. © <em>Lunar and Planetary Institute</em>, Paul Schenk

    Voici Tenzing Montes, les plus hautes montagnes de Pluton. Vue en perspective de la chaîne de montagne située sur la bordure ouest de la plaine Spoutnik. © Lunar and Planetary Institute, Paul Schenk

    Les détails surpassent ceux des versions préliminaires. Ce fut une aventure captivante pour l'équipe. « C'était l'un des projets de cartographie planétaire les plus complexes et les plus passionnants auxquels j'ai eu le plaisir de participer, raconte Paul Schenk. Chaque fois que de nouvelles images tombaient, quelque chose de nouveau se révélait. »

    Que nous révèlent les nouvelles cartes de Pluton et Charon ?

    Grâce à ces nouvelles cartes, les chercheurs peuvent mieux deviser de la diversité des reliefs de Pluton et ainsi, espérer mieux comprendre ce qui les a façonnés et ce qui se trame à l'intérieur de cet astreastre de 2.370 km de diamètre (selon une étude, il ferait assez chaud à l'intérieur, assez douillet pour qu'un océan d'eau liquideliquide puisse y exister).

    Les données confirment que les plus hauts sommets de Pluton sont à Tenzing Montes, situé en bordure sud-ouest de la grande plaine Spoutnik. Ils s'élèvent jusqu'à 6 km au-dessus de la glace visqueuse de cette formation caractéristique de l'astre. Pour les chercheurs, il ne fait plus de doutes que ces montagnes soient composées essentiellement d'eau, de glace d'eau et non de glace d'azoteazote ou de méthane, car celles-ci seraient alors trop fragiles et finiraient par s'écrouler.

    Les nouvelles cartes topographiques nous apprennent aussi que les endroits les plus profonds sur Pluton sont en bordure de la plaine SpoutnikSpoutnik : partout, la moyenne est de 2,5 km sous le niveau zéro, sauf sur les marges où elle est de 3,5 km. Non loin de la plaine en forme de cœur, les chercheurs ont identifié une longue structure de plus de 3.000 km, un système de crête et de creux très érodé, allant du nord au sud. Il s'agit sans doute de la cicatricecicatrice encore visible d'une fracturation très ancienne. Pour l'instant, les chercheurs ne s'expliquent pas encore pourquoi c'est à cet endroit.

    Chaîne de montagnes et plaines volcaniques sur Charon vues ici en perspective. © Lunar and Planetary Institute, Paul Schenk

    Chaîne de montagnes et plaines volcaniques sur Charon vues ici en perspective. © Lunar and Planetary Institute, Paul Schenk

    Enfin, Charon, aux reliefs très accidentés, n'est pas en reste et le LPI nous apprend qu'il y existe des dépressions plus profondes encore que la fosse des Mariannes sur Terre. Jusqu'à 14 km dans une région proche du pôle Nord. Et quant à celle qui ceinture l'astre et marque une séparationséparation entre ses deux hémisphères, elle s'enfonce jusqu'à 8 km. « La cartographie des terrains fracturés du nord et des blocs crustaux inclinés le long de cette limite pourrait être due au resurfaçage cryovolcanique, peut-être provoqué par le naufrage de grands blocs crustaux à l'intérieur de Charon », indique le communiqué.

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    Pluton : les raisons d'aller rebondir et tourner autour de cette planète naine

    New Horizons nous a dévoilé un monde fascinant. La moisson de données a été tellement fructueuse que trois ans après son survolsurvol historique, les scientifiques continuent encore d'en apprendre à son sujet. « [...] j'ai hâte de voir l'autre côté de Pluton révélé en détail par une future mission en orbiteorbite autour de la planète », déclarait le directeur de la mission Alan Stern. Nous aussi.


    Pluton en vue : New Horizons dresse une nouvelle carte de la planète naine

    Article de Xavier DemeersmanXavier Demeersman publié le 8 juillet 2015

    Il y eut finalement plus de peur que de mal après l'incident technique qu'a connu New Horizons le 6 juillet. La sonde va très bien a indiqué la NasaNasa et reprend ses observations scientifiques, à moins d'une semaine de son survol de Pluton. Sur les trois images prises avec Lorri, les 1er, 2 et 3 juillet, on cerne un peu mieux les étranges structures sombres qui ceinturent la planète naine au niveau de son équateuréquateur et s'interrompent en pointillés. Cette visite inédite nous réserve plein de surprises, à l'instar de la découverte progressive de CérèsCérès, cette autre planète naine...

    Après plus de neuf années de voyage depuis la Terre, nous voici aux portesportes de Pluton (nom latin d'Hadès, dieu des Enfers et des mondes souterrains). Dans moins d'une semaine, nous découvrirons enfin, avec un niveau de détails inégalé, la surface de cette planète naine d'environ 2.300 km de diamètre, découverte en 1930. Les chercheurs espèrent aussi trouver des réponses à leurs nombreuses questions sur ce système double (Pluton-Charon) : reliefs, atmosphèreatmosphère, éventuels anneaux, sans oublier leurs curieux petits satellites naturels...

    Depuis plusieurs mois, nous découvrons progressivement la surface de Cérès, la première planète naine visitée par une sonde spatiale, et nous avons fait connaissance avec ses multiples taches blanches et brillantes de nature encore inconnue. À présent que nous nous rapprochons de Pluton à travers les yeuxyeux de New Horizons, d'étranges taches sombres à la surface de ce monde lointain nous intriguent.

    La planète naine Pluton photographiée entre le 1<sup>er</sup> et le 3 juillet avec le télescope Lorri de New Horizons. Le graphique en dessous précise la position de l’équateur de cette planète naine. On distingue une bande sombre tout au long qui se fragmente en grosses plaques (image de droite). La sonde spatiale survolera le 14 juillet la région claire qui est visible sur la partie droite de la première image. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    La planète naine Pluton photographiée entre le 1er et le 3 juillet avec le télescope Lorri de New Horizons. Le graphique en dessous précise la position de l’équateur de cette planète naine. On distingue une bande sombre tout au long qui se fragmente en grosses plaques (image de droite). La sonde spatiale survolera le 14 juillet la région claire qui est visible sur la partie droite de la première image. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    Des taches sombres photographiées par le télescope Lorri

    Ci-dessus, les trois dernières images transmises par la sonde avant que celle-ci ne rencontre une panne informatique qui, fort heureusement, a été résolue et n'affecte pas la mission. Elles ont été prises entre le 1er et le 3 juillet avec le télescope Lorri (Long Range Reconnaissance Imager), respectivement à 14,9 puis 8,3 et enfin 7,8 millions de km de distance.

    Les images ont été traitées par déconvolution, une technique fiable qui permet d'entrevoir les grandes structures qui affleurent sur la planète naine. L'aspect dentelé visible sur le bord du globe est dû à ce procédé. La Nasa indique que lorsque la sonde spatiale sera au plus près de Pluton, elle survolera les régions qui figurent à droite de la première photo, une surface claire qui contrastecontraste avec la bande sombre qui s'étale en grande partie le long de son équateur.

    Comme on peut le constater sur l'image de droite, cette ceinture surnommée la Baleine (the whale) s'interrompt en une sorte de pointillés ou tirets de quelques centaines de kilomètres chacun. Repérée fin juin, cette série de quatre taches en apparence régulière intrigue autant l'équipe scientifique que les formes grumeleuses situées juste au-dessus et qui sont alternativement claires et sombres. Pour l'instant, « nous n'avons pas de cratères d'impact confirmés », a indiqué le responsable scientifique de la mission, Alan Stern (Southwest Research Institute). Ce qui suggère une surface soumise à des transformations plus ou moins régulières et récentes, en dépit d'une distance de notre étoileétoile, 32 fois supérieure à celle qui sépare la Terre du SoleilSoleil. Beaucoup d'énigmes attendent New Horizons et ses sept instruments.

    Une nouvelle carte de Pluton créée à partir des données de Lorri et Ralph, deux des sept instruments de New Horizons. La région claire au centre sera survolée par la sonde spatiale le 14 juillet prochain. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    Une nouvelle carte de Pluton créée à partir des données de Lorri et Ralph, deux des sept instruments de New Horizons. La région claire au centre sera survolée par la sonde spatiale le 14 juillet prochain. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    New Horizons observera une « baleine » et un « donut  » !

    Le 7 juillet, la Nasa a publié une carte composite de Pluton acquise avec les instruments Lorri et RalphRalph, entre le 27 juin et le 3 juillet. Bien entendu, la résolutionrésolution ne permet pas encore d'appréhender distinctement les paysages de ce petit monde lointain mais elle donne déjà un aperçu de ce qui attend la sonde dans quelques jours.

    Au centre figure la région que survolera New Horizons le 14 juillet. Vaste de quelque 1.600 km, il s'agit de l'étendue la plus claire de Pluton. Il est probable que cette zone soit constituée de dépôts relativement récents de méthane, d'azote et de monoxyde de carbonemonoxyde de carbone gelé...

    Image en couleurs de Pluton créée à partir de celle prise par le télescope Lorri de New Horizons, associée aux données obtenues avec l’instrument Ralph, quelques jours auparavant. Les grandes taches sombres visibles en bas chevauchent l’équateur de la planète naine. De nouveaux détails sont apparus au-dessus de cette région, à mesure que la sonde se rapproche. Des images à comparer avec celles d’<a href="//www.futura-sciences.com/magazines/espace/infos/actu/d/astronomie-image-telescope-hubble-cartographie-pluton-22529/" title="En image : le télescope Hubble cartographie Pluton">Hubble</a> réalisées en 2010. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    Image en couleurs de Pluton créée à partir de celle prise par le télescope Lorri de New Horizons, associée aux données obtenues avec l’instrument Ralph, quelques jours auparavant. Les grandes taches sombres visibles en bas chevauchent l’équateur de la planète naine. De nouveaux détails sont apparus au-dessus de cette région, à mesure que la sonde se rapproche. Des images à comparer avec celles d’Hubble réalisées en 2010. © Nasa, JHUAPL, SwRI

    À gauche de cette région centrale, on reconnait « la Baleine », la bande sombre évoquée plus haut qui longe l'équateur sur environ 3.000 km. À l'extrême gauche de celle-ci, au niveau de la « queue », on distingue une formation circulaire que les Américains ont d'ores et déjà nommée « donut ». Cela pourrait être un cratère ou un volcan, mais les chercheurs de la mission préfèrent attendre les images plus détaillées des prochains jours avant de se prononcer. Dans la moitié droite de la carte, on retrouve les quatre étranges taches sombres de Pluton. Elles rejoignent la « queue » de la « Baleine ».

    « Il est facile d'imaginer que nous voyons des formes familières dans cette étrange collection de reliefs clairs et sombres » commente John Spencer (Southwest Research Institute), chef adjoint de l'équipe de l'imagerie, géologiegéologie, et géophysique de la sonde. « Cependant, il est encore trop tôt pour savoir de quoi il s'agit vraiment. »

    Les observations scientifiques ont repris le 7 juillet en fin de journée. La sonde n'était alors qu'à 8 millions de kilomètres, aussi Pluton devrait apparaître 1,6 fois plus grande sur des images d'une résolution trois fois supérieure ! Nul doute que beaucoup de surprises attendent les équipes de New Horizons.