On connaît très peu de galaxies naines en orbite autour de la Voie lactée. L’une des plus récemment découvertes semble briller dans le domaine des rayons gamma d’une façon anormale, difficilement explicable dans le cadre de l’astrophysique standard. À moins de supposer, comme le veulent certains modèles de matière noire froide, que la galaxie naine nommée Reticululm 2 soit emplie de ces particules mythiques défiant encore une détection directe dans les laboratoires terrestres...

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    Le match entre le modèle de la matière noirematière noire froide et Mond continue avec des rebondissements multiples au niveau des galaxies naines comme le montrent les travaux publiés sur arXiv par un groupe d'astrophysiciensastrophysiciens concernant Reticulum 2. Cette galaxie naine très peu lumineuse a récemment été découverte par un autre groupe de chercheurs travaillant dans le cadre du projet Dark Energy Survey.

    Il consiste à mener des campagnes d'observations de la structure à grande échelle de l'univers et de sa dynamique en observant dans le visible et l'infrarouge les galaxies et les supernovaesupernovae sur la voûte céleste de l'hémisphère sudhémisphère sud. L'objectif est de mieux comprendre la nature de l'énergie noire, notamment grâce à l'étude des oscillations acoustiques des baryons, ou BAO pour baryon acoustic oscillations. Mais, en l'occurrence, la découverte de Reticulum 2 s'est accompagnée de celle d'une possible détection directe de l'existence de particules de matière noire particulières : des Wimps.

    Les Nuages de Magellan sont bien visibles sur cette photo prise dans le désert de l'Atacama, au Chili, sur le site de l'observatoire du Paranal où se trouve le VLT de l'Eso. Six des nouveaux objets découverts à proximité de la Voie lactée sont représentés, accompagnés de photos pour les plus brillants d'entre eux. © V. Belokurov, S. Koposov (IoA, Cambridge). Photo : Y. Beletsky (<em>Carnegie Observatories</em>)

    Les Nuages de Magellan sont bien visibles sur cette photo prise dans le désert de l'Atacama, au Chili, sur le site de l'observatoire du Paranal où se trouve le VLT de l'Eso. Six des nouveaux objets découverts à proximité de la Voie lactée sont représentés, accompagnés de photos pour les plus brillants d'entre eux. © V. Belokurov, S. Koposov (IoA, Cambridge). Photo : Y. Beletsky (Carnegie Observatories)

    La matière noire et l'énigme des galaxies naines

    Le modèle de la matière noire froide prédit que de nombreuses petites galaxies naines devraient s'être formées par effondrementeffondrement gravitationnel de la matière noire (qui domine par sa massemasse la matière baryonique normale) et qu'elles se répartiraient de façon uniforme autour des galaxies. Or, les observations montrent que non seulement il n'en existe que très peu autour de la Voie lactée et d'Andromède, mais qu'elles se rassemblent plutôt en disque. Il s'agirait donc en fait de naines de maréemarée issues de la condensationcondensation de courants d'étoilesétoiles arrachées par des forces de maréeforces de marée lors d'interactions entre galaxies. Ces faits sont des énigmes dans le cadre du modèle cosmologique standardmodèle cosmologique standard mais ils se comprennent mieux dans le cadre d'une de ses alternatives que certains essaient de construire dans le cadre théorique de Mond. Plutôt que de faire appel à de nouvelles particules encore inobservées, celui-ci propose de modifier les lois de la gravitationgravitation de NewtonNewton à grande échelle.

    Il existe toutefois une seconde prédiction du modèle de la matière noire froide concernant les galaxies naines. Elles devraient contenir beaucoup plus de matière noire que des grandes galaxies comme la Voie lactéeVoie lactée. Or, certains modèles de WimpsWimps prédisent que ces particules peuvent s'annihiler en émettant des photonsphotons gamma. On a cherché une telle signature des particules de matière noire au centre de la Galaxie puisque le modèle de la matière noire prédit aussi qu'elle devrait se concentrer dans les bulbes des galaxies spiralesgalaxies spirales. Les annihilations de particules de matière noire devraient donc y être plus fréquentes, produisant une émissionémission diffuse de rayons gammarayons gamma plus intense. Les instruments du télescopetélescope gamma en orbiteorbite de la NasaNasa, Fermi, ont bel et bien trouvé une telle signature potentielle des particules de matière noire.

    W44 et IC 443 sont des restes de supernova brillant en gamma dans les observations de l'instrument Fermi. Bien des sources similaires existent dans la Voie lactée, de sorte qu'il n'est pas facile de savoir si certaines émissions gamma sont ou non le produit de l'annihilation de particules de matière noire. Pour cette raison, les astrophysiciens se tournent aussi vers l'étude des galaxies naines en gamma. © Nasa,<em> Fermi LAT Collaboration</em>

    W44 et IC 443 sont des restes de supernova brillant en gamma dans les observations de l'instrument Fermi. Bien des sources similaires existent dans la Voie lactée, de sorte qu'il n'est pas facile de savoir si certaines émissions gamma sont ou non le produit de l'annihilation de particules de matière noire. Pour cette raison, les astrophysiciens se tournent aussi vers l'étude des galaxies naines en gamma. © Nasa, Fermi LAT Collaboration

    Wimps ou étoiles à neutrons ?

    Mais les astrophysiciens sont prudents. Ils savent que des astresastres compacts comme les trous noirstrous noirs accrétant de la matière et des étoiles à neutrons peuvent également produire des photons gamma. Il n'est donc nullement évident que les émissions gamma observées au cœur de la Voie lactée soient une preuve de l'existence de particules encore jamais observées sur Terre dans des expériences comme celles que l'on mène au LHC.

    Pour contourner l'obstacle, les chercheurs ont eu l'idée de se tourner vers les galaxies naines proches de notre Galaxie. En effet, la théorie prédit qu'elles sont pauvres en étoiles, et donc aussi en cadavres stellaires produits par l'évolution des ces étoiles, mais particulièrement riche en matière noire. Bien que le signal soit a priori faible, son existence est plus difficilement explicable en invoquant la présence d'astres compacts. C'est pourquoi la détection d'un rayonnement gamma diffusdiffus en provenance de la nouvelle galaxie naine découverte en orbite autour de la Voie lactée, à une distance d'environ 98.000 années-lumièreannées-lumière, est si excitante.

    Bien que confiants, les astrophysiciens des universités de Carnegie Mellon, Brown et Cambridge qui ont observé Reticulum 2 avec Fermi gardent la tête froide. Il reste encore du travail à effectuer avant de pouvoir affirmer qu'il y a là la preuve tant attendue de l'existence des particules de matière noire.