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On sait qu'au XIXe siècle, Auguste Comte avait affirmé que la composition chimique et la température des étoiles ne seraient jamais connues. ll ne semblait pas possible que l'Homme puisse un jour se rendre à la surface de ces astres pour y utiliser un thermomètrethermomètre ou faire l'analyse chimique des gaz que l'on pourrait y récolter. Il avait tort, comme la découverte de la spectroscopie allait le démonter rapidement. Celle-ci permit à plusieurs pionniers, dont l'un des plus importants fut le jésuite italien Pietro Angelo Secchi (1818 -1878), de classifier les étoiles. La classification de Secchi fut suivie au début du XXe siècle par celle de Harvard et par l'établissement du fameux diagramme de Hertzsprung-Russell montrant la luminositéluminosité d'un ensemble d'étoiles en fonction de leur température effective. Ce type de diagramme a permis d'étudier les populations d'étoiles et d'établir la théorie de l'évolutionthéorie de l'évolution stellaire.
Cette théorie de l'évolution stellaire s'est d'abord développée grâce aux travaux des pionniers de la structure stellaire pendant la première moitié du XXe siècle dont les noms les plus illustres sont ceux d'Eddington et Chandrasekhar. Mais ce sont surtout les progrès fulgurants de l'astrophysique nucléaire après la seconde guerre mondiale qui ont aidé à bien comprendre le destin des étoiles comme le Soleil, passé un point de leur évolution.
Une simulation d'artiste de la fin de la Terre lorsque le Soleil deviendra une géante rouge. © Esa/Hubble (M. Kornmesser & L. L. Christensen)-dreamlandscheme/YouTube
Nous savons ainsi que d'ici 5 milliards d'années environ, le Soleil se mettra à gonfler, après avoir fait fusionner les noyaux d'hydrogènehydrogène des couches externes de son cœur en héliumhélium et les noyaux mêmes de ce cœur. Il deviendra un exemple de ce qu'on appelle une géante rougegéante rouge. Ses couches externes se dilatant, il avalera à coup sûr Mercure et VénusVénus et peut-être la Terre. Ce faisant, les températures extrêmes du plasma baignant ces planètes finiront par les vaporiser. Les planètes ardentes d'André Brahic, comme Saturne ou NeptuneNeptune, verront les températures de leur atmosphèreatmosphère augmenter mais elles ne seront pas avalées par le Soleil mourant.
Le lithium, la trace d'une exoplanète défunte
À l'appui de ce scénario, on connaissait déjà le cas d'exoplanètes ayant survécu au stade de géante rouge de leur soleil. Les chercheurs les ont baptisées « planètes chthoniennes ». Mais ce n'est qu'aujourd'hui que les preuves de la destruction d'une exoplanèteexoplanète par une géante rouge sont apportées. Elles sont exposées par des astrophysiciensastrophysiciens dans un article disponible sur arxiv et qui concerne la géante rouge BD+48 740.
Une vue d'artiste de la planète qui a peut-être été avalée par la géante rouge BD+48 740. Combien ont déjà subi ce sort dans la Voie lactée ? © Nasa
Les chercheurs se sont servis des instruments du Hobby-Eberly Telescope pour observer cette étoile plus vieille que le Soleil, environ 1,5 fois plus massive et presque 11 fois plus grande que notre étoile. L'analyse spectroscopique leur a montré que l'atmosphère de BD+48 740 était anormalement riche en lithiumlithium. C'est un élément plutôt rare dans l'universunivers qui a été synthétisé essentiellement quelques minutes après le Big BangBig Bang. Fragile, ce noyau est facilement détruit par les étoiles et il ne devrait donc pas être aussi abondant, à la surface d'une étoile évoluée, que le montrent les observations des astrophysiciens.
Il existe cependant un scénario dans lequel une telle richesse anormale de lithium s'explique naturellement. Il s'agit précisément de l'engloutissement d'une exoplanète par une géante rouge. Comme l'explique l'un des chercheurs, Alex Wolszczan : « Les théoriciens n'ont identifié que quelques circonstances très particulières, autres que le Big Bang, en vertu desquelles le lithium peut être créé dans les étoiles. Dans le cas de BD+48 740, il est probable que la production de lithium ait été déclenchée par une massemasse de la taille d'une planète qui a sombré en spiralant à l'intérieur de l'étoile, provoquant son échauffement tandis que l'étoile la digérait ».
Une autre observation vient conforter l'hypothèse de la destruction d'une planète que BD+48 740 aurait avalée. En effet, les astronomesastronomes ont détecté une géante gazeusegéante gazeuse, d'au moins 1,6 fois la masse de JupiterJupiter, avec une orbiteorbite très elliptique très inhabituelle autour de cette étoile. Au plus près, elle n'est qu'à environ la distance de Mars au Soleil de BD+48 740 mais peut se retrouver bien plus loin. Il est possible d'expliquer cette excentricitéexcentricité anormale en faisant précisément intervenir une planète dévorée par BD+48 740 et les perturbations gravitationnelles résultantes.
On connaît environ 50 géantes rouges avec des exoplanètes et ce nombre devrait augmenter. Peut-être trouvera-t-on d'autres traces de ces catastrophes cosmiques où une planète rocheuseplanète rocheuse, abritant peut-être autrefois une forme de vie, retourne à l'état gazeuxétat gazeux de sa naissance dans un disque protoplanétairedisque protoplanétaire.