55 Cancri e ne serait pas une planète océan dans le sens habituel du terme. La superTerre découverte en 2004 serait bien entourée d’une enveloppe d’eau, d’après les observations de Spitzer, mais cette eau serait dans un état supercritique à plus de 1.700 °C.
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C'est par la méthode des transits planétaires, l'une des plus utilisées par les astronomes pour détecter des exoplanètes, que l'on vient tout juste de préciser le rayon de la superTerre 55 Cancri e. Située à seulement 40 années-lumière de la Terre environ, l'exoplanète boucle son orbite en seulement 17 h 40 mn autour de l'étoile 55 Cancri A, une naine jaune légèrement moins massive que le Soleil tout juste visible à l'œil nu. 

Les mesures confirment que le rayon de cette superTerre est d'environ 2,2 fois celui de notre planète. Or, sa masse en est évaluée à 7,8 fois, ce qui correspond à peu près à la moitié de la masse de Neptune. S'il s'agit incontestablement d'une planète rocheuse, sa densité moyenne est telle qu'il faut admettre qu'elle est entourée d'une enveloppe fluide.

On pourrait tout d'abord penser qu'il s'agit d'hydrogène et d'hélium mais une telle atmosphère ne pourrait subsister que quelques millions d'années tout au plus. La température de surface de 55 Cancri e doit facilement atteindre 1.760 °C. Dans ces conditions, et avec un champ gravitationnel bien plus faible que celui d'une étoile comme le Soleil, des gaz aussi légers ne tardent en effet pas à quitter une planète comme 55 Cancri e.

Il faut en conclure que l'enveloppe fluide existant probablement autour de 55 Cancri e doit être principalement composée de molécules d'eau.

Une planète « océan »... sans eau liquide

Mais il ne peut s'agir d'une véritable planète océan, comme la planète Aquaend de la mythique série de Jodorowsky et Moebius : l'Incal. Non, les conditions de pressions et de températures qui y règnent imposent qu'au moins une partie de cette enveloppe d'eau soit dans un état supercritique. 


Sur cette vidéo, l'expérience commence avec une simple évaporation de CO2 liquide avec une diminution progressive de la hauteur de la ligne de séparation entre forme liquide et gazeuse en équilibre pour le CO2. La vidéo se poursuit en montrant différents passages du gaz carbonique à l'état supercritique avec retours à l'état liquide. On observe alors que ce passage se constate lorsque la ligne de séparation entre les deux états disparaît. Lorsqu'un fluide est supercritique, il se trouve dans un état intermédiaire entre un liquide et un gaz, sans différences nettes. © Flachzange1337, YouTube

Dans un tel océan « supercritique », il ne devrait pas pouvoir y exister des formes de vie exotiques du genre de celles imaginées par Carl Sagan  dans l'atmosphère de Jupiter ou de Saturne. La planète est bien trop chaude pour cela puisque sa température en surface, supérieure au point de fusion du fer, résulte d'une trop grande proximité par rapport à son étoile hôte. Elle gravite en effet à une distance 25 fois plus courte que Mercure autour du Soleil, en moins de 18 h. De plus, l'eau supercritique, que l'on peut obtenir sur Terre en portant de l'eau à des températures supérieures à 374 °C sous une pression supérieure à 221 bars, est un puissant solvant pour presque tous les composés organiques.

Cette superTerre, bien que composée à 20 % d'eau, est donc un monde bien plus chaud qu'une Arrakis. En fait, on a toutes les raisons de penser qu'elle n'a pas pu se former proche de son étoile à cause de cette enveloppe fluide. Elle a dû migrer et il se pourrait même que ce soit un exemple d'ancien cœur rocheux de géante gazeuse, en train de perdre les derniers vestiges de son enveloppe de gaz et de glace.