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L'astronaute français Thomas PesquetThomas Pesquet de l'Agence spatiale européenne a été affecté à une mission de longue durée à bord de la Station spatiale internationale (ISS). Il rejoindra le complexe orbitalcomplexe orbital en 2016 pour un séjour de six mois. Avec cette affectation, l'Esa n'est pas peu fière que les six astronautes de la promotion 2009 aient séjourné à bord de la Station dans les sept années suivant la remise de leur diplôme.
Aujourd'hui, des six nouveaux astronautes, seul l'Italien Luca Parmitano a volé à bord de l'ISS, cet été. L'Allemand Alexander Gerst s'envolera en mai et reviendra en novembre 2014 pour laisser sa place à l'Italienne Samantha Cristoforetti, qui séjournera également six mois à bord de l'ISS, de novembre 2014 à mai 2015. Enfin, le Danois Andreas Mogensen effectuera un court séjour de dix jours en septembre 2015 et le Britannique Timothy Peake s'envolera à la fin de l'année 2015 pour un séjour de six mois (Expedition 46-47).
Conférence de presse de l'annonce de l'affectation de Thomas Pesquet (au centre) à une mission de six mois à bord de l'ISS. Il rejoindra la Station en 2016. © Esa, Nadia Imbert-Vier
Futura-Sciences : Qu’est-ce qui vous a le plus agréablement surpris pendant votre période de formation et d’entraînement ?
Thomas Pesquet : Ce sont mes collègues astronautes. Je ne m'imaginais pas que nous allions devenir à ce point d'aussi bons amis. Ce ne sont pas seulement des gens brillants avec qui il est très facile de travailler : ce corps européen des astronautes est une véritable famille. Cela m'a vraiment surpris de voir à quel point nous sommes devenus proches.
Seul regret, nous ne volerons pas ensemble dans l'espace. Enfin, pour l'instant. Qui sait, dans le futur, on peut imaginer que plusieurs Européens soient en même temps dans la station pour une mission de six mois. Ce serait une grande première !
À contrario, qu’est-ce qui a été le plus éprouvant pendant cette période ?
Thomas Pesquet : Je pense que cela a été d'apprendre le russe. Après, il y a des choses qui ont été difficiles physiquement, comme le froid et la faim lors de nos stages de survie. Cela dit, j'ai une mémoire sélective et je ne garde que les bons souvenirs. Quand je me retourne et que je regarde tout le chemin parcouru depuis ma sélection en 2009, je ne vois que des choses positives.
Comment se prépare-t-on psychologiquement à un séjour de longue durée dans l’ISS ?
Thomas Pesquet : Je pense que cela a débuté pendant la période de sélection en 2008 et 2009. Elle a beaucoup porté sur la psychologie. Pourquoi ? Parce que l'on sait que les missions à bord de l'ISS, et d'exploration plus tard, ont des impacts non négligeables sur la psychologie des gens. Néanmoins, on ne sait pas ce qui va se passer dans la tête des gens lorsqu'ils vont perdre de vue la Terre et se retrouver seuls dans le noir de l'espace. Gardez à l'esprit que cela n'est jamais arrivé et que l'on n'est jamais allé plus loin que les missions ApolloApollo de la Nasa des années 1960 et 1970.
Pour en revenir à la sélection, nous avons réalisé beaucoup de tests de psychologie, d'entretiens de groupe. Pendant notre formation, nous avons eu droit au programme d'entraînement souterrain Caves, qui consiste à nous enfermer sous terre pendant une ou deux semaines. C'est très intéressant. On fait de l'exploration en équipe, en s'adaptant et travaillant ensemble, avec un confort minimal. Cela nous permet de voir comment on gère les différences d'opinions et de priorités. Bref, on apprend beaucoup sur soi-même.
Comment se prépare-t-on physiquement au séjour dans l’ISS ?
Thomas Pesquet : Évidemment, il faut être en bonne forme physique générale. Pendant un vol de longue durée à bord de l'ISS, on perd quelque 10 % de masse osseuse et musculaire, malgré l'entraînement. Au bout de six mois, certes, on perd, mais plus on part d'une bonne condition physique et moins le résultat sera mauvais.
Vous astreignez-vous à un entraînement spécifique ?
Thomas Pesquet : Oui. Par exemple, les muscles du dosdos. Sur Terre, on n'a pas conscience de s'en servir en permanence, pour se tenir droit, debout ou assis. Dans la station, on n'a pas besoin de ces postures, de sorte que si l'on ne s'entraîne pas à cela, eh bien, dès notre retour sur Terre, on ne pourrait pas tenir droite la colonne vertébralecolonne vertébrale. On fait donc de la musculation du dos, des cuisses, des jambes.
Autre exemple, les sorties en scaphandre. Là, il faut être plutôt fort du haut du corps. Le scaphandre s'oppose au mouvementmouvement. Compte tenu de la pressurisation à 0,4 atmosphèreatmosphère, dès que l'on veut faire un mouvement, comme serrer les mains, il faut savoir se battre contre cette résistancerésistance. Il est donc important d'entraîner les mains, les avant-bras, les poignets et les épaules.
Thomas Pesquet au Centre européen des astronautes, en Allemagne. Il est ici vu dans une maquette de Colombus et de la boîte à gants de l'Esa. © Esa, S. Corvaja
Quels types d’expériences scientifiques souhaiteriez-vous réaliser à bord de l’ISS ?
Thomas Pesquet : Bien que ce ne soit pas moi qui vais définir le programme scientifique qui sera réalisé pendant ma mission, on va tout de même demander mon avis. Surtout que je vais être le cobaye de nombreuses expériences (rires).
Clairement, j'ai à cœur que ce qui sera fait à bord de l'ISS soit utile et applicable directement. La recherche médicale m'intéresse, notamment ce qui concerne la génétiquegénétique des virus ou la microencapsulation, une technique pour délivrer des médicaments au cœur des cellules cancéreuses. J'ai d'autres centres d'intérêt, comme la science des matériaux.
Avec l'horloge atomique PharaoPharao, qui sera installée pendant ma mission, je vais m'essayer à la science fondamentale. Certes, cela dépasse mon niveau scientifique, mais tester la théorie de la relativité d'EinsteinEinstein dans l'espace avec l'horloge atomiquehorloge atomique la plus précise au monde, cela me plaît.
Quelle est votre feuille de route d’ici à votre lancement ?
Thomas Pesquet : C'est beaucoup d'entraînement dans les différents centres des partenaires de la Station spatiale internationale. Je dois connaître par cœur les 13 modules de l'ISS pour pouvoir y travailler, mais également les réparer le cas échéant. Je dois également me qualifier sur le SoyouzSoyouz. Certes, je ne serais pas le pilote, cette place est toujours occupée par un cosmonautecosmonaute, mais je dois être capable de prendre les commandes en cas de nécessité.
Je dois également me préparer aux sorties extravéhiculaires, bien que pour l'instant je ne sache pas si je pourrais en réaliser une, et me familiariser au maniement du bras robotique de la Station. En effet, je dois être capable d'aider à arrimer des vaisseaux ravitailleurs, déplacer des charges à l'extérieur de l'ISS. Enfin, je dois également m'entraîner au programme scientifique en me familiarisant avec les expériences de façon à les comprendre et les réaliser en orbiteorbite sans coup férir.
Pouvez-vous dévoiler les anecdotes les plus marquantes de votre formation et votre entraînement d’astronaute ?
Thomas Pesquet : Il y en a tellement, et elles sont forcément survenues en groupe. Je me souviens, par exemple, d'une bataille de boules de neige mémorable en stage d'immersion, ou encore d'un grand fou rire qui nous a tous pris lors de notre premier vol parabolique. Aussi, en stage de survie, quand après trois jours livrés à nous-mêmes, nous avons réussi à capturer un lapin et à le cuisiner. Je pense que cela a été un de mes meilleurs repas.