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La perturbation humaine du cycle de l’azote est particulièrement importante. Les flux anthropiques, liés à l'industrie et aux engrais chimiques, sont aussi importants que les flux naturels. Les activités industrielles émettent 90 millions de tonnes d'oxydes d'azoteoxydes d'azote (NONOx) et d'ammoniacammoniac (NH3) par an dans l'atmosphère. Les engrais chimiques diffusent 80 millions de tonnes de composés azotés dans le sol chaque année.
Comprendre le cycle de l'azote est un facteur clé pour prévoir la réponse de l'océan au changement climatiquechangement climatique, car c'est l'un des nutrimentsnutriments limitants pour la vie dans les océans. Les échanges d'azote sont dominés par des transformations microbiennes, la biomasse ne l'assimilant que sous forme de minérauxminéraux (NO3- et NH4+). Dans l'océan, il existe des zones de minimum d’oxygène (OMZ) où les microbesmicrobes sont capables d'utiliser diverses sources d'azote dissous. Ils produisent des gaz à effet de serre tels que l'oxyde nitreux, ou protoxyde d'azoteprotoxyde d'azote (N2O), 300 fois plus puissant que le CO2, qui sont ensuite libérés dans l'atmosphère.
Zones océaniques de minimum d'oxygène (au niveau des flèches). La barre de couleur indique les concentrations d'oxygène dissous en µM, ou 10-6 mol/L (mole par litre), à une profondeur de 300 m. Environ 30 à 50 % des pertes d'azote ont lieu dans ces zones, qui ne représentent que 0,1 % du volume de l'océan. © World Ocean Atlas 2009
Ces OMZ contribuent pour 20 à 40 % de la perte globale d'azote de l'océan et auraient tendance à s'étendre. La plus grande OMZ du monde se trouve à l'est du Pacifique équatorial sud. Des scientifiques du Max PlanckPlanck Institute for Marine Microbiology ont donc étudié cette zone de près. Ils cherchaient à identifier et interpréter les mécanismes de régulation de perte de l'azote. « Cette recherche est fondamentale pour améliorer les modèles biogéochimiques actuels parce que jusqu'ici, nos modèles ne peuvent pas reproduire fidèlement les tendances de la perte d'azote que l'on mesure », explique Andreas Oschlies du Geomar de Kiel, en Allemagne.
Des bactéries par milliards dans des zones sans oxygène
Récemment publiés dans la revue Nature, leurs résultats montrent que la perte d'azote dans l'OMZ du Pacifique équatorial sud est liée à l'enfouissement des matièresmatières organiques dans les eaux côtières pauvres en oxygène. En effet, cette région héberge des milliards de bactériesbactéries. Elles fixent l'azote et le convertissent en gaz selon deux processus, la dénitrification et l'anammox (c'est-à-dire l'oxydationoxydation anaérobique de l'ionion ammonium, NH4+, avec un ion nitrite NO2-). L'ion NH4+ provient de la minéralisation de la matière organique.
Les facteurs qui régulent la perte d'azote par anammox restaient jusqu'alors inconnus. Dans cette étude, les chercheurs ont estimé le bilan total d'azote de l'OMZ en mesurant les concentrations en éléments nutritifs, les taux de transformation de l'azote et à partir d'un modèle numériquemodèle numérique qui calcule le taux d'exportation d'azote. Ils ont constaté que les taux de perte d'azote atteignent un maximum dans les eaux côtières hautement productives, où de grandes quantités de matière organique chutent de la surface de l'océan.
La chute de la matière organique comme déclencheur
L'anammox était donc le mode dominant de la perte d'azote au moment de l'échantillonnageéchantillonnage. Globalement, les taux de transformation de l'azote, anammox compris, étaient fortement corrélés avec l'exportation de la matière organique. La chute de la matière organique (et donc la libération de l'ammonium dans la colonne d'eau) ainsi que la libération d'ammonium benthiquebenthique attisent la perte d'azote des zones de minimum d'oxygènezones de minimum d'oxygène.
Ces résultats permettront d'estimer de façon plus réaliste les impacts de la désoxygénation de l'océan. Ils permettront en outre de déterminer précisément comment la productivité bactérienne change le cycle de l'azote dans les OMZ, ainsi que le reste de l'océan. C'est essentiel pour estimer la quantité de CO2 qui peut être absorbée par l'océan à l'avenir.