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L'Arctique abrite de nombreuses réserves de méthane (CH4)), un puissant gaz à effet de serre, emprisonné dans les sols gelés de la toundra ou sous formes de clathrates, des hydrates de méthane, dans les sédiments marins. Cette situation ne poserait aucun problème s'il n'y avait pas un réchauffement climatique en cours. Malheureusement, l'augmentation actuelle des températures provoque une libération progressive de ce gaz dans l'atmosphèreatmosphère. Une situation préoccupante qui fait l'objet de nombreux suivis.
Eric Kort, un chercheur du NasaNasa Jet Propulsion LaboratoryJet Propulsion Laboratory (JPL), vient de jeter un pavé dans la mare en dévoilant une nouvelle source d’émission de méthane atmosphérique en Arctique : l'océan lui-même. Publié dans la revue Nature Geoscience, ce résultat a été obtenu grâce à la réalisation de plusieurs campagnes aériennes de mesures effectuées entre les deux pôles, en passant au-dessus de l'océan Pacifique.
Présentation (en anglais) de l'avion Gulfstream V utilisé par divers organismes américains pour étudier la composition de l'atmosphère au-dessus des États-Unis, et dans le reste du monde lors de campagnes internationales. © NCAREOL, Youtube
L’océan Arctique, une source de méthane d’origine naturelle
Ces campagnes aériennes font partie du projet Hippo (HIAPER Pole-to-Pole Observations), un programme devant permettre de mieux déterminer l'origine et les lieux de stockage des gaz à effet de serre se retrouvant dans l'atmosphère. Elles sont menées à partir d'un avion Gulfstream V bardé d'instruments de mesure, affrété par le NCAR (National Center for Atmospheric Research), lors de vols réalisés entre 150 mètres et 12 kilomètres d'altitude.
La découverte d'Erik Kort se base sur des données récoltées durant cinq vols réalisés en 2009 et en 2010. Une augmentation de 0,5 % de la concentration atmosphérique en méthane a été observée lors du survolsurvol à basse altitude (entre 100 et 400 mètres d'altitude) de régions éloignées de l'océan Arctique, donc en plein océan (au nord des mers de Bering et des Tchouktches). L'absence de monoxyde de carbone, un gaz issu de la combustioncombustion de composés carbonés et donc lié aux activités anthropiques, a permis de confirmer l'origine naturelle de ces émanations.
La nature des gaz est connue, mais pas sa provenance. Certaines mesures ont été réalisées à de grandes distances des côtes, durant des saisonssaisons froides (notamment en novembre). Le gaz ne pouvait pas provenir de réservoirs géologiques ou des terresterres situées à de hautes latitudeslatitudes. Il ne restait donc qu'une source à explorer : les océans.
L’émission du méthane océanique amplifiée par la fonte des glaces
La surface des océans a été mise en cause après avoir interconnecté les résultats de mesures de concentrations atmosphériques en CH4, en vapeur d'eau, en CO et en ozone. Le méthane s'échappe de l'eau aux travers des fissures parcourant la banquisebanquise ou dans des zones où la couverture de glace est partielle, c'est-à-dire en des lieux où l'eau de mer interagit avec l'atmosphère. Pour preuve, aucune augmentation de la concentration en CH4 n'a été observée au-dessus de banquises solidessolides et intactes.
L'origine du gaz s'échappant de l'eau n'est pas encore connue mais de nombreux organismes aquatiques sont pointés du doigt. Une augmentation de 0,5 % n'est pas importante localement, mais l'océan Arctique est vaste. Dans le futur, l'augmentation de la fonte des glaces provoquera une exposition plus importante de l'eau à l'atmosphère, la libération de méthane par cette source devrait ainsi s'accroître. Elle doit donc être suivie. Pour rappel, un kilogrammekilogramme de méthane a autant d'effet sur le réchauffement climatique que 23 kg de CO2.
De nouvelles études vont maintenant être menées afin de comparer la quantité de méthane émise par les océans par rapport aux autres sources.