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Le mérou brun est le poisson emblématique de la Méditerranée. Il se développe et se porte bien grâce depuis la mise en place des aires marines protégées. © Camille Albouy
Enjeu majeur de préservation de la biodiversité, la mer Méditerranée compte plus d'une centaine d'aires marines protégées (AMP). Afin d'évaluer l'efficacité de ce réseau d'AMP, des chercheurs de l'IRD, du CNRS, de l'université Montpellier 2, d'Aix-Marseille université (AMU), de Mercator Océan et de l'université du Québec ont pour la première fois quantifié un élément déterminant : le degré de connectivité entre ces aires. À partir de modèles biophysiques de dispersion larvaire et en étudiant le cas du mérou brun (Epinephelus marginatusEpinephelus marginatus)), espèce emblématique locale, ils ont démontré que le réseau d'AMP est faiblement connecté, menaçant potentiellement la préservation d'espèces présentant des caractéristiques biologiques similaires.
Les résultats de cette étude, qui s'inscrivent dans le cadre du programme « modélisationmodélisation et scénarios de la biodiversité » animé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRBFRB), sont publiés dans la revue Plos One le 8 juillet 2013.
Cette carte du bassin méditerranéen montre la connectivité entre aires marines protégées. Les couleurs représentent la probabilité de connexion. © Marco Andrello
Des AMP pour préserver la biodiversité
Zones délimitées en mer et associées à des mesures de préservation des écosystèmes, les AMP assurent la sauvegardesauvegarde des habitats essentiels à la reproduction et à la croissance des espèces. Elles jouent ainsi un rôle primordial dans la conservation de la biodiversité. Alors que la surface de la mer Méditerranée ne représente que 0,82 % de la surface totale des mers et océans du globe, elle regroupe 4 à 18 % des espèces marines, avec un taux d'endémismeendémisme de 8,8 %. Pour pallier la surexploitation de nombreuses espèces de poissons et d'invertébrésinvertébrés dans cette zone clé, plus d'une centaine d'AMP ont été créées sur les côtes méditerranéennes. Cependant, leurs emplacements répondent plus à des contraintes politiques et économiques locales qu'à une réelle stratégie globale.
Dans cette étude, les chercheurs ont évalué pour la première fois l'impact de ce réseau d'AMP sur la préservation de la biodiversité en mer Méditerranée, en étudiant la connectivité du réseau, c'est-à-dire le niveau d'échange d'individus entre les AMP et les différentes régions. En effet, la connectivité est un élément déterminant pour la protection des espèces marines exploitées (notamment les espèces mobilesmobiles) et la durabilitédurabilité de la pêchepêche.
En prenant l'exemple du mérou brun, sévèrement exploité et dont la survie dépend des AMP, et en utilisant des modèles biophysiques de dispersion larvaire, ils ont montré que les AMP méditerranéennes sont loin de constituer un véritable réseau connecté. En effet, les distances entre les aires sont de 1.032 km en moyenne, alors que la distance moyenne de dispersion des larveslarves de mérou brun n'est que de 120 km, ce qui laisse de nombreuses populations locales totalement isolées. De plus, les chercheurs soulignent la grande hétérogénéité de la distribution des AMP, avec une faible densité dans le sud-est, laissant ainsi près de 20 % du plateau continentalplateau continental sans aucun apport larvaire.
Prendre en compte la connectivité dans la désignation des futures AMP
Ces résultats mettent en exergue le rôle déterminant de la connectivité des AMP pour préserver la biodiversité. En effet, un réseau bien connecté serait plus efficace et permettrait le maintien de bonnes conditions de recrutement sur l'ensemble du plateau continental méditerranéen. Le modèle utilisé dans cette étude pourrait ainsi être utilisé pour évaluer la connectivité d'autres AMP et comme outil d'aide à la désignation des futures AMP dans les pays du nord et du sud.
C'est un défi d'autant plus important dans le contexte actuel de changement climatique, dont les impacts sur la connectivité sont déjà mesurables (l'augmentation de la température des mers a des conséquences sur la survie des larves et des adultes, et altère notamment les facteurs physiquesphysiques de la circulation marine).