Au-delà de tous les organismes, animaux ou végétaux, qui ont succombé suite à la marée noire provoquée par l'explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon, les nappes pétrolières ont intoxiqué durablement les êtres vivants des écosystèmes touchés, comme en témoignent les killies, petits poissons des marais.

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    Plus de deux mois après la catastrophe de Deepwater Horizon, des particules d'hydrocarbures ont été retrouvées dans l'organisme de poissons. © ideum, cc by sa 2.0

    Plus de deux mois après la catastrophe de Deepwater Horizon, des particules d'hydrocarbures ont été retrouvées dans l'organisme de poissons. © ideum, cc by sa 2.0

    Le 20 avril 2010, la plateforme pétrolière Deepwater Horizon explosait dans le golfe du Mexique, engendrant une marée noire sans précédent. Une équipe de l'université d’État de Louisiane, vient de montrer que plusieurs mois après, malgré l'apparente absence de résidus dans les eaux et marais de la côte américaine touchée par la catastrophe, certains poissons subissent encore des effets délétères.

    Une dizaine de jours après l'explosion de la plateforme, alors que, selon les plus fortes estimations, 11 millions de litres de pétrolepétrole s'échappaient quotidiennement du forage de BP, la marée noire atteignait les côtes de la Louisiane et plus particulièrement les marais du bayou dégradant durablement l'ensemble de l'écosystème.

    Un des sites pollués par la marée noire, où des killies ont été prélevés. © Whitehead et al. 2011 - PNAS

    Un des sites pollués par la marée noire, où des killies ont été prélevés. © Whitehead et al. 2011 - PNAS

    Des poissons témoins de la pollution

    Deux mois plus tard, alors que ces marais semblaient débarrassés des nappes de pétrole, l'infime quantité de particules restantes était néanmoins suffisante pour toucher la biodiversité, comme en témoignent les travaux - publiés dans Pnas - d'Andrew Whitehead et ses collègues.

    Ces scientifiques ont analysé les tissus de killies (Fundulus grandis), petits poissons de la famille des Fundulidés, à trois périodes différentes : au début du mois de mai 2010, avant que la fuite de pétrole ne touche l'écosystème étudié, en juin, au plus fort de la contaminationcontamination, et en août, alors qu'aucune trace de pollution n'était plus visible. Ces poissons ont été choisis comme modèle d'étude par les chercheurs car ils sont particulièrement abondants dans la région touchée par Deepwater Horizon et très sensibles aux effets toxiques des polluants organiques. Ils ont été prélevés dans les marais de six sites de la baie de Barataria, située à 300 km environ de la fuite.

    Les hydrocarbures aromatiques polycycliques montrés du doigt

    Si deux mois après avoir atteint ces marais, le pétrole était invisible, il était pourtant toujours présent et de surcroît actif. Les analyses ont montré que les hydrocarbures aromatiqueshydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), présents dans le pétrole brut, avaient un effet néfaste sur l'expression des gènesgènes de ces poissons et sur leurs embryonsembryons, et entraînaient également des malformationsmalformations. Par exemple, les scientifiques ont noté des atrophiesatrophies au niveau des branchies des poissons. Ces malformations et altérations dans l'expression des gènes ne sont pas létales mais réduisent le succès reproducteur chez les individus touchés. Ce déficit concerne tout l'écosystème car les killies constituent un maillon important de la chaîne alimentairechaîne alimentaire.

    Les auteurs de l'étude confirment par ailleurs que les doses sublétales de HAP auxquels les différents organismes ont été exposés plus de deux mois après la catastrophe ne sont pas assez importantes pour les rendre impropres à la consommation.