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D'après une étude menée par une équipe de chercheurs de l'IRD de Nouméa, en Nouvelle Calédonie, le taux de recouvrement des récifs en corail vivant devrait ainsi passer de 40 % aujourd’hui à travers le Pacifique, à 10 ou 20 % en 2050. © usfws pacific, Flickr, cc by 2.0
Isolées en plein cœur de l'océan, les îles du Pacifique dépendent étroitement de la pêche pour leur économie et leur sécurité alimentaire. Mais le réchauffement de la planète devrait considérablement diminuer leurs ressources accessibles en poissons, au cours des prochaines décennies. C'est ce que révèle, dans la revue Nature Climate Change, une étude menée par l'Institut de recherche pour le développement (IRD), le Secrétariat général de la communauté du Pacifique (CPS) et leurs partenaires français, australiens et américains.
D'après les projections climatiques du Giec (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climatGroupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat), la quantité de poissons des récifs coralliens, essentiels pour l'alimentation des habitants, risque de baisser de 20 % d'ici 2050. Les chercheurs ont étudié la réponse de la biomasse de poissons au changement climatiquechangement climatique dans le Pacifique, selon les prévisions du Giec. La pêche des bonites, poissons de la famille des thonidés qui constituent 90 % des prises, sera notamment très affectée.
Le poisson clown vit dans les anémones. Mais d'après cette étude, dans les îles du Pacifique, 20 % de poissons coralliens devraient disparaître d'ici 2050. © Nemo’s Great Uncle, Flickr
Les thons migrent à l’est et l’écosystème corallien est mis à mal
D'après les modélisationsmodélisations effectuées, l'élévation de la température des eaux de surface, plus importante à l'ouest du bassin océanique, entraînerait la migration des thons vers la Polynésie, à l'est. Les zones de prises s'éloigneraient ainsi des côtes mélanésiennes, des îles Salomon ou encore de Papouasie-Nouvelle-Guinée. L'exode de ces thonsthons en dehors des eaux territoriales de ces pays représentera une perte économique significative. Les droits de pêche versés par les grandes pêcheries internationales constituent en effet une importante rentrée d'argentargent pour les petits États insulaires.
Le long des côtes, la disponibilité des poissons récifaux est également en péril. Le réchauffement océanique annoncé augmentera le blanchissement des corauxblanchissement des coraux et engendrera donc la mort de nombreux récifs. La croissance démographique, dans ces territoires jusque-là préservés, viendra également ajouter une forte pressionpression sur les écosystèmes coralliens (exploitation, dégradation, pollution, etc.). Le taux de recouvrement des récifs en corailcorail vivant devrait ainsi passer de 40 % aujourd'hui à travers le Pacifique, à 10 ou 20 % en 2050. Selon l'étude, cette perte réduira de 20 % la quantité de poissons coralliens, qui constituent une ressource alimentaire capitale pour les populations locales.
Des secteurs à développer : aquaculture, pêcherie en eau douce
Certaines îles du Pacifique pourront toutefois se tourner vers l'aquacultureaquaculture et les pêcheries en eau douceeau douce. En effet, sur terreterre se joue un tout autre scénario qu'en mer. L'augmentation attendue des pluies, qui étendra de plus de 10 % la surface des lacs et cours d'eau (entre autres) d'ici 2050, pourrait favoriser ces activités. Les scientifiques encouragent donc dans leur nouvelle étude le développement de ces secteurs.
Pour pallier les pertes prévues, ils invitent aussi les gouvernements à faciliter l'accès aux ressources thonières pour les pêcheurs locaux. Ceci, en installant par exemple, le long des côtes, des dispositifs de concentration de poissons, sortes de pontons flottants qui les attirent. Enfin, d'autres ressources halieutiquesressources halieutiques, encore non exploitées, pourraient être mises à profit, comme le maquereau, l'anchois, ou encore la sardine.
Minimiser les risques en préservant les récifs et maximiser les opportunités. Tel est le défi que les petits États du Pacifique devront relever dans les décennies à venir, pour faire face au changement climatique et à la demande croissante en poissons de leur population en forte expansion.