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En Antarctique, 379 lacs sous-glaciaires ont été découverts ces 50 dernières années, mais sous la calotte groenlandaise, aucun. On expliquait jusqu'à aujourd'hui cette différence par le fait qu'au Groenland, la surface de glace est inclinée, conduisant toute eau liquideliquide à s'écouler vers la marge. Mais cette explication est à réviser puisque des chercheurs ont mis en évidence l'existence de deux lacs, cachés sous 800 m de glace. L'équipe, menée par le glaciologue Steven Palmer, suggère que ces lacs ont une superficie de 8 à 10 km2.
La découverte est de taille car un lac sous-glaciaire influence le mouvementmouvement de la glace, et joue donc un rôle dans les variations du niveau de la mer. Un glacier est dynamique, et sur l'inlandsis, il s'écoule sous l'effet de son propre poids. La présence d'eau liquide peut fortement influencer la vitessevitesse d'écoulement, agissant tel un lubrifiantlubrifiant. Une étude a notamment montré que l'eau de fonte, en s'infiltrant dans les crevasses, accélérait le déplacement de la glace, et donc la fontefonte des glaciers.
Sur la calotte du Groenland, on observe ce type de lacs, formés à partir de l'eau de fonte. Ces étendues d'eau peuvent s'infiltrer dans la couche de glace, et générer des lacs sous-glaciaires. © Halorache, Wikipédia, cc by sa 3.0
Un système de circulation de l'eau ouvert
Situés dans un bassin de drainagedrainage de 980 km2, les lacs récemment découverts sont positionnés à respectivement 16 et 11,5 km d'une fracture de glace. Ils sont approximativement à 560 m au-dessus du niveau de la mer. Ces étendues d'eau, dont leur description fait l'objet d'un article publié dans les Geophysical Research Letters, sont probablement différentes de celles que l'on trouve généralement en Antarctique. Les chercheurs pensent en effet que ces lacs sont alimentés par l'eau de fonte de surface, et peut-être même par un lac, formé en surface durant les étés particulièrement chauds.
En Antarctique, la température de l'airair est toujours négative, il ne peut pas se former de lac ni d'eau de fonte en surface. Par ailleurs, la couche de glace au pôle Sud est si épaisse qu'elle peut agir comme une couverture isolante. Ainsi de l'eau liquide, piégée sous cette couche, peut ne pas geler. Au Groenland en revanche, la couverture de glace est plus fine, on s'attend donc à ce que toute eau liquide gèle.
L'eau de fonte circule dans toute la calotte groenlandaise
Dans leur article, les chercheurs formulent deux hypothèses pour expliquer la formation de ces poches d'eau. S'ils ne sont pas alimentés par l'eau de fonte, les lacs peuvent avoir été générés de la même façon que le lac sous-glaciaire du glacier Taylor en Antarctique. C'est une poche d'eau où l'eau est si salée qu'elle ne peut geler. Si les lacs au Groenland s'étaient formés de la sorte, cela impliquerait qu'ils sont isolés de la surface depuis au moins 115.000 ans. Toutefois pour obtenir cette sorte de saumure, la salinitésalinité doit être si importante qu'il faudrait qu'il y ait eu à un moment donné de l'eau de mer. Or ces lacs sont à plus de 500 m du niveau de la mer, donc les chercheurs estiment cette théorie peu probable.
Si ces lacs résultent d'un système de circulation de l'eau de fonte, alors la calotte polaire est grandement menacée. En effet, de plus en plus de lacs d'eau de fonte se forment chaque été en surface. Il est donc possible qu'il existe d'autres lacs sous-glaciaires similaires à ceux tout juste découverts. Si c'est le cas, les conséquences pour l'avenir de la calotte groenlandaise seront importantes. L'eau de fonte amplifie l'écoulement des glaciers, donc la présence des lacs accélérera la réponse de la calotte au changement climatique.