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Les puces produites actuellement sont composées d'au minimum 500 colonies bactériennes ou biopixels pouvant toutes clignoter en même temps. Le rôle de la puce est de synchroniser le comportement de toutes les colonies entre elles. © Université de Californie, San Diego
Le magazine Nature a publié cette semaine un article présentant les travaux surprenants d'une équipe de chercheurs composée d'Arthur Prindle, Phillip Samayoa, Ivan Razinkov, Tal Danino, Lev S. Tsimring et de Jeff Hasty. Ils appartiennent tous à différents laboratoires de l'université de Californie à San Diego. Cette équipe a réussi à fabriquer des panneaux lumineux composés de millions de bactéries capables de briller régulièrement et simultanément.
Pour parvenir à leurs fins, des protéinesprotéines fluorescentes ont été attachées aux « horloges biologiqueshorloges biologiques » de chacune des bactéries du dispositif. Celles-ci ont ensuite été divisées en une multitude de colonies. L'étape suivante a consisté à synchroniser toutes les horloges, permettant à toutes les cellules vivantes d'une même unité de produire de la lumièrelumière en même temps. Enfin, toutes les colonies ont été synchronisées entre elles. Le résultat final permet d'obtenir des milliers d'ensembles bactériens, eux-mêmes composés de centaines d'unités vivantes, capables de briller en même temps. Il ne reste plus qu'à déposer ces unités lumineuses sur une plaque particulière et l'on obtient le panneau désiré.
Cette vidéo (en anglais) présente les différentes étapes du développement des panneaux lumineux composés de millions de bactéries. On peut y voir également des exemples de fonctionnement et certaines applications pratiques. © UCsandiego/YouTube
Derrière cette apparente simplicité se cachent des mécanismes d'une complexité extrême, notamment en ce qui concerne la coordination des cellules vivantes entre elles. Les bactériesbactéries peuvent en effet synchroniser l'expression de certains gènes (dont ceux produisant des protéines fluorescentes) grâce à l'émissionémission de signaux moléculaires, un processus très efficace à petite échelle. En revanche, il ne fonctionne pas quand il s'agit d'harmoniser les mécanismes cellulaires de 60 millions d'organismes vivants. La dernière bactérie commencerait à produire de la lumière alors que la première se serait déjà illuminée plusieurs fois. Autre écueil, les clignotements risquent de ne pas être synchronessynchrones.
Pour résoudre ce problème, les bactéries ont été divisées en colonies, chacune étant hébergée dans une cellule du dispositif d'étude. Le fait de limiter l'espace abritant les bactéries rend la communication moléculaire efficace. La dernière étape a consisté à trouver une solution pour synchroniser tous les cellules du système expérimental entre elles. C'est là que les chercheurs se sont rendu compte que chaque colonie émettait du gazgaz. Un gaz qui a été partagé entre toutes les cellules du dispositif au moyen d'une puce apte à gérer et diriger ces émanations. À partir de ce moment, toutes les unités bactériennes ont pu briller simultanément. Chaque colonie forme un point lumineux et correspond donc à un biopixel. La plus grosse puce est actuellement composée de 13.000 biopixels.
Des panneaux bactériens clignotants ! Pour quoi faire ?
Au-delà de l'exploit technique que représente cette découverte, les auteurs ont souligné l'utilité que pourrait avoir leur dispositif dans la vie de tous les jours. Les panneaux pourraient être employés en tant que biocapteurs. Ils permettraient de fournir des informations sur la présence ou l'absence de divers polluants, substances toxiques ou organismes pathogènespathogènes. Tout dépendrait de la sensibilité des bactéries face à ces différents agents. L'importance et la vitessevitesse de diminution du clignotement fourniraient alors des informations sur le niveau de toxicitétoxicité de l'élément détecté en temps réel. Pour preuve, un dispositif permettant de déceler une contaminationcontamination de l'airair par de l'arsenicarsenic a déjà été développé. Les capteurscapteurs biologiques présenteraient un autre avantage non négligeable : ils permettraient de fonctionner continuellement dans le temps alors que de nombreux systèmes de détection chimique ne sont utilisables que ponctuellement.
Les scientifiques estiment qu'il faudra néanmoins 5 ans pour développer un biocapteur capable de tenir dans la main.