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Pour certains gaz on pense que, comme pour du fer ou du nickel cristalin, lorsque le couplage entre les "aimants atomiques" devient grand (en allant de la gauche vers la droite sur ce schéma), les atomes s'alignent alors brutalement en présence d'un champ magnétique et gardent l'aimantation. Le paramagnétisme se change alors en ferromagnétisme. Crédit : MIT-Gyu-boong Jo
Les phénomènes magnétiques sont connus depuis l'Antiquité mais on peut, approximativement, dater le début de leur étude scientifique à la publication en 1600 du célèbre De Magnete de William Gilbert. Ce n'est toutefois qu'avec Oersted et surtout Ampère que le sujet décolla vraiment.
L'origine des propriétés magnétiques des milieux matériels ne commença à être compris, lui, qu'avec la découverte de l'électron, et surtout avec la mécanique quantique. Dans les années 1920 les noms de Heisenberg, Pauli et Ising sont associés à de célèbres travaux théoriques portant sur le paramagnétisme et le ferromagnétisme. On comprit que les électrons, en plus d'avoir un moment cinétique intrinsèque décrit par la mécanique quantique (le spin), possédaient un moment magnétiquemoment magnétique relié à ce dernier. Les électrons peuvent donc se décrire comme de petits aimantsaimants susceptibles de s'aligner dans un champ magnétiquechamp magnétique extérieur et de s'influencer magnétiquement les uns les autres pour s'aligner spontanément. Il se crée alors un champ magnétique supplémentaire résultant de la somme de chacun de celui des électrons.
Lorsqu'il tourne autour d'un noyau, un électron possède aussi un moment cinétique dit orbital. Combiné au spin d'un électron, il dote certains atomesatomes, comme ceux du ferfer et du nickelnickel, de propriétés magnétiques à l'origine de ce qu'on appelle le ferromagnétismeferromagnétisme. Sous l'action d'un champ magnétique extérieur ces atomes s'alignent comme des aimants et, de plus, des effets quantiques subtils conduisent à ce que l'aimantationaimantation persiste, même lorsque le champ magnétique extérieur est interrompu.
Depuis des dizaines d'années, les théoriciens se demandaient si le même phénomène pouvait se produire non pas avec les métauxmétaux, qui sont cristallins, mais avec des gazgaz. Les expérimentateurs eux aussi sont partis à la recherche du phénomène mais jusqu'à présent les tentatives s'étaient révélées infructueuses.
Un groupe de chercheurs du MIT vient pourtant de publier dans Science un article dans lequel ils affirment avoir observé le ferromagnétisme dans un gaz.
Un gaz, oui, mais fermionique
Comme pour les métaux, cela n'est pas possible avec n'importe quel atome. Il faut que ces atomes soient des fermionsfermions et se comportent donc comme des électrons avec un moment cinétique demi entier. En termes techniques, il faut que l'on soit en présence d'un gaz fermionique, c'est le cas avec par exemple un gaz d'électrons libres. L'analogue existe aussi avec des liquidesliquides fermioniques comme celui composé d'héliumhélium 3 et celui existant, pense-t-on à l'intérieur des étoiles à neutrons.
En l'occurrence, les chercheurs du MIT menés par le prix Nobel de physiquephysique Wolfgang Ketterle, bien connu pour ses travaux sur les condensats de Bose-Einsteincondensats de Bose-Einstein, ont employé des atomes de lithiumlithium 6 refroidis à 1,5 10-11 kelvinkelvin !
En général, les interactions magnétiques entre les atomes d'un gaz ou d'un liquide fermionique ne sont pas assez fortes pour que se produise une aimantation spontanée avec alignement durable des aimants constitués par les atomes. Toutefois, en jouant sur les caractéristiques d'un champ magnétique externe, il est possible d'ajuster l'intensité du couplage magnétique entre les atomes.
Il arrive alors un moment où les atomes de lithium ultra-froids piégés par un laserlaser infrarougeinfrarouge manifestent des signes de l'apparition du phénomène de ferromagnétisme. Bien que les experts voient dans ces signes la signature du ferromagnétisme, ils n'en constituent pas une preuve irréfutable. D'autres expériences sont nécessaires.