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Selon certaines estimations, plus d'un Européen sur cinq souffrirait de troubles de la santé liés au stress sur le lieu de travail. S'intéresser au lien avec les maladies du cœur n'a donc rien d'anodin. © Pemotret, StockFreeImages.com
Ces dernières années, le rôle d'une série de facteurs psychologiques (la personnalité, la cognition, le stress) a été étudié dans la survenue de maladies cardiovasculaires. Le stress psychologique a été le facteur le plus examiné, en particulier le stress au travail, combinaison d'une forte demande de travail avec peu de marges de manœuvre. Des études précédentes ont mis en exergue une association entre le stress au travail et un risque de survenue d'évènements coronariens multiplié par deux. D'autres travaux suggèrent un risque bien plus modeste. Pour améliorer les connaissances sur le sujet, le consortium européen IPD-WORK (Individual-Participant-Data Meta-analysis in Working Populations) a été initié en 2008.
Le consortium regroupe treize cohortescohortes européennes, dont la cohorte française Gazel constituée de près de 20.000 agents d'EDF-GDF suivie depuis 1989. Des chercheurs de l'Inserm, Marcel Goldberg, Archana Singh Manoux et Marie Zins, de l'université Versailles-Saint Quentin, ont contribué à la plus large analyse jamais conduite sur l'association entre le stress au travail et la survenue d'événements coronariens. La particularité de cette grande analyse est qu'elle regroupe les données individuelles de 197.473 participants inclus dans les cohortes européennes, permettant aux chercheurs de mieux cerner l'association étudiée sur un grand nombre de cas. Les résultats sont publiés dans le journal The Lancet.
Le stress suivi sur plus de 20 ans
Les cohortes étudiées, initiées de 1985 à 2006, sont celles de sept pays: Belgique, Danemark, Finlande, France, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suisse.
La moyenne d'âge des participants est de 42,3 ans et la population étudiée présente autant de femmes que d'hommes. Le stress au travail a été évalué par des questionnaires portant sur les aspects psychosociaux liés au travail. Il s'agit par exemple d'analyser la demande, l'excès de travail des individus, les demandes conflictuelles auxquelles ils sont confrontés, le temps restreint pour accomplir les tâches qui leur sont confiées.
Il a déjà été avéré que le stress en lui-même engendre des risques de maladies cardiovasculaires. Le stress au travail ne fait pas exception, et favorise les défaillances cardiaques ou les infarctus. © Inserm
La proportion d'individus exposés au stress au travail variait entre 12,5 % et 22,3 % selon les précédentes études. Sur cette grande population, elle représente 15,3 %.
En parallèle, sur les 200.000 individus, les chercheurs ont recensé 2.358 événements coronariens, sur une période de sept ans de suivi en moyenne.
Des risques plus importants d’accidents cardiovasculaires
En harmonisant les données, « les résultats obtenus à partir des 13 cohortes européennes révèlent que les individus exposés au stress au travail ont un risque de 23 % plus élevé que ceux qui n'y sont pas exposés de faire un infarctus » explique Marcel Goldberg, chercheur à l'Inserm et professeur à l'université de Versailles-Saint Quentin. Quand on prend en compte des modes de vie, l'âge, le sexe, le statut socioéconomique et la répartition géographique des participants, les résultats sont pratiquement inchangés.
Si l'on étudie la population globale (stressée et non stressée), les chercheurs considèrent que le stress au travail est associé à une augmentation du risque relativement modeste de faire un infarctus, mais qui n'est pas négligeable : « Dans notre étude, 3,4 % des infarctus recensés parmi les 200.000 individus sont attribuables au stress au travail. Sur les 100 à 120.000 infarctus survenant en France chaque année, cela correspondrait tout de même à environ 3.400 à 4.000 accidentsaccidents imputables à ce facteur de risquefacteur de risque », souligne Marcel Goldberg.
L'équipe de recherche européenne suggère de renforcer la préventionprévention du stress au travail pour réduire ce risque existant. De telles mesures préventives pourraient avoir également un impact positif sur d'autres facteurs de risque, tels que le tabac et l'alcool dont la consommation est partiellement liée au stress selon des études récentes réalisées par ce même consortium.