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Le 20 juillet 1976, sept ans jour pour jour après l'alunissage d'Apollo 11Apollo 11, l'atterrisseur de la sonde Viking 1 se pose en douceur sur la planète Mars. Les premières images, en noir et blanc, sont immédiatement expédiées vers la Terre. C'est la première fois que l'on voit le sol martien d'aussi près et cette vision, pourtant annoncée par les observations antérieures, déçoit. L'image montre un sol aride et nu, uniquement peuplé de cailloux. Un mois et demi plus tard, le 3 septembre, l'atterrisseur de Viking 2Viking 2, jumeaujumeau de son prédécesseur, se pose à son tour.
Les deux engins, de plus de deux mètres de large pour 576 kilogrammes, sont des photographes mais aussi des géologuesgéologues. Au bout d'un bras, un godet gratte le sol et ramène à bord des échantillons étudiés par plusieurs instruments, dont un chromatographe en phase gazeuse (qui sépare les différents constituants d'un mélange), un spectromètre de masse et un spectromètre à fluorescence X (qui déterminent la nature chimique de chacun de ces éléments).
En plus de ces analyses chimiques, plusieurs expériences sont réalisées à bord pour repérer d'éventuels signes d'une activité biologique. Les résultats furent considérés comme négatifs, mais certains scientifiques pensent que des indices ont pu échapper aux instruments des Viking, dont Rafael Navarro-Gonzalez (Universidad Nacional Autónoma, Mexico), un biologiste spécialiste de la vie en conditions extrêmes et collaborateur de la Nasa. Depuis, les engins envoyés vers ou sur Mars ont eu comme objectif des études géologiques et aucune autre expérience biologique n'a été réalisée.
La toute première image du sol martien photographié sur place, prise le 20 juillet 1976 par la caméra de la sonde Viking 1, qui venait juste d'atterrir. Après calibrage, des images en couleurs ont été réalisées dans les jours suivants. © JPL/Nasa
La surprise de Phoenix : le perchlorate
Dans un article à paraître dans la revue Journal of Geophysical Research-Planets, le chercheur mexicain revient, avec des collègues, sur l'une des expériences des sondes Viking. La Nasa a repris l'information sur son site. Cette nouvelle analyse repose sur la découverte majeure du dernier explorateur du sol martien, la sonde Phoenix, qui s'est posée le 25 mai 2008 et a définitivement cessé d'envoyer de ses nouvelles le 24 mai 2010.
En 1976, les seules molécules organiques (contenant une chaîne de carbonecarbone) qu'avaient détectées les atterrisseurs Viking étaient le chlorométhane et le dichlorométhane. A l'époque, la présence de ces composés chlorés a été considérée comme un artefact. Du perchlorate (ClO4-), un composé très actif surtout lorsqu'il est chauffé, a en effet été retrouvé dans les échantillons (après chauffage) et il semblait provenir des solutions embarquées dans le laboratoire automatique pour nettoyer les instruments.
Or, à la surprise générale, PhoenixPhoenix a justement découvert du perchlorate dans le sol martien. Cette molécule n'était donc peut-être pas issue d'une contaminationcontamination. Pour comprendre comment cette molécule avait pu fausser les résultats de l'expérience de 1976, Rafael Navarro-Gonzalez et ses collègues (dont Chris McKay, de la Nasa) ont réalisé une nouvelle expérience sur le sol d'un désertdésert chilien contenant des composés organiques. En ajoutant du perchlorate et en effectuant la même analyse que celle réalisée à bord de Phoenix, les chercheurs ont retrouvé... du chlorométhane et du dichlorométhane.
« Le perchlorate devient un oxydant puissant lorsqu'il est chauffé, commente Chris McKay. Il a pu rester dans le sol martien durant des milliards d'années au milieu de molécules organiques sans les abîmer, mais quand vous chauffez le sol pour chercher ces composés organiques, le perchlorate les détruit rapidement. » Selon lui, « nos résultats suggèrent que non seulement des molécules organiques mais aussi du perchlorate peuvent avoir été présents dans le sol sur les deux sites d'atterrissage de Viking ».
Reste que la preuve n'est pas complète. De plus, ces composés organiques peuvent provenir d'une activité géologique ou de météoritesmétéorites. Enfin, l'interprétation, en 1976, selon laquelle le perchlorate provenait d'une contamination n'est pas sans fondement. Elle reposait sur les quantités relatives de deux isotopesisotopes du chlorechlore, qui correspondaient exactement au rapport 1 à 3 observé sur Terre. Mais on ne connaît pas exactement ce rapport sur Mars. S'il est semblable, l'origine martienne du perchlorate des expériences Viking deviendrait une hypothèse très plausible.
Bref, la découverte est un résultat très important qui incite à des expériences supplémentaires. La Nasa en profite pour rappeler qu'elles auront bien lieu, à partir de 2012, grâce à la mission MSL, Mars Science Laboratory. Le gros roverrover (775 kilogrammes) qui sera déposé sur la planète parcourra entre 5 et 20 kilomètres et réalisera 70 analyses du sol martien. L'affaire continue...