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Vincent F. Chevrier a passé sa thèse il y quelques années au Centre Européen de Recherche et d'Enseignement des Géosciences de l'Environnement (Cerege). Il est aujourd'hui professeur assistant au Centre des Sciences Spatiales et Planétaires de l'Arkensas. Avec son étudiant Travis S. Altheide, il vient de publier dans Geophysical Research Letters un article qui donne peut-être l'explication des récents écoulements liquides observés par la sonde Mars Global Surveyor.
On connaissait depuis longtemps les réseaux d'écoulements de Mars et les impressionnantes ravines qui entaillaient les terrains martiens. On avait aussi de bonnes raisons de se douter que de l'eau devait se trouver en abondance dans le sol sous forme de glace, et la présence de volcansvolcans pouvait laisser espérer une activité volcanique toujours présente, conduisant parfois à la fonte locale du pergélisolpergélisol martien.
Cliquer pour agrandir. Trois années séparent ces images prises par Mars Clobal Surveyor. Elles montrent une dune occupant un cratère (sans nom) de la région d'Hellespontus. Une écoulement récent s'y révèle clairement. Crédit : Nasa/JPL/MSSS
Malgré tout, les équations de la thermodynamique délivraient un tout autre message. Dans les conditions de températures et de pressions régnant sur Mars, de l'eau liquide gèlerait très rapidement en surface dans tous les cas de figure. Elle ne peut donc être responsable des ravines récentes aussi longues que celles observées par les sondes martiennes en orbiteorbite.
Bien sûr, le sol martien semble être riche en sel et on sait bien que de l'eau très salée, sous forme de saumuresaumure, à un point de congélation plus bas que de l'eau douceeau douce. Malheureusement, à moins de faire intervenir un basculement de l'axe des pôles de Mars il y a quelques centaines de milliers d'années qui aurait momentanément conduit à un climatclimat plus chaud, il n'y avait pas moyen de rendre compte des écoulements d'eau liquide.
Des ravines se forment encore
Or, la sonde Mars Global Surveyor ayant effectué deux passages à la verticale de certaines régions de Mars à 3 ans d'intervalle, des traces d'écoulements absentes lors du premier survolsurvol étaient incontestablement apparues, ruinant l'explication faisant intervenir un changement climatiquechangement climatique ancien.
Chevrier et Altheide ont cependant réalisé que le chlorure de sodiumsodium, ou d'autres sels chlorés, n'étaient pas les seuls à pouvoir se retrouver dans des saumures sur Mars. Avec sa richesse en soufresoufre et en ferfer, du sulfate ferrique, (Fe2(SO4)3) devait même être plus abondant que le sel de nos océans.
De fait, de la jarositejarosite, un sulfate de fer, a bien été trouvée sur Mars en 2004. Se pouvait-il que des saumures basées sur du Fe2(SO4)3 restent liquides à des températures suffisamment basses pour expliquer les observations de Mars Global Surveyor ?
Pour le savoir, les deux chercheurs ont fabriqué différentes saumures à base de sulfate ferrique et les ont soumises aux conditions de températures et de pressions martiennes. Ils ont découvert dans un premier temps que certaines de ces saumures pouvaient effectivement restées liquides dans les conditions demandées.
Mais il y a mieux. En traçant sur la carte de Mars des frontières entourant les régions où règnent des températures permettant à ces saumures de rester liquides, en l'occurrence au-dessus de -68 °C, l'immense majorité des ravines observées se retrouve bien dans la zone géographique ainsi définie.
L'explorations du sol martien continue conjointement avec les sondages radar et la découverte des suintements de méthane. Peut-être ne tarderons-nous pas à savoir si la théorie proposée pour expliquer les ravines martiennes est exacte.